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Fragments de France

A La Réunion, quand les femmes s’imposent sur les docks

Par  (Le Port (La Réunion), correspondant) et Romain Philippon/Inland Stories (Photos)
Publié le 20 octobre 2021 à 04h45, modifié le 16 novembre 2021 à 09h40

Temps de Lecture 9 min.

Face à elle, un massif conteneur de 40 pieds (plus de douze mètres), tout juste enlevé du pont du MSC-Tiana-F et suspendu à l’un des portiques du grand port maritime de La Réunion. Equipée d’un casque bleu de sécurité et d’un gilet jaune fluorescent, Isaline Thémyr enregistre le « numéro du plomb », la carte d’identité de cette boîte métallique géante.

A ses côtés, Stéphanie Molinier et Tricya Aaron retirent « les pitons », des pièces métalliques à tête triangulaire. Dans le bruit des moteurs et des sirènes, elles haussent la voix pour nous expliquer que ces « twist locks » servent à unir les conteneurs entre eux sur le navire. Mine de rien, chacun pèse cinq kilos.

100 « Fragments de France »

A six mois de l’élection présidentielle, Le Monde brosse un portrait inédit du pays. 100 journalistes et 100 photographes ont sillonné le terrain en septembre pour dépeindre la France d’aujourd’hui. Un tableau nuancé, tendre parfois, dur souvent, loin des préjugés toujours. Ces 100 reportages sont à retrouver dans un grand format numérique.

Ce samedi matin, les dockers de la Société de manutention et de consignation maritime (Somacom) doivent décharger 471 conteneurs de ce bateau vieillot arrivé en fin de nuit de Port-Louis (Ile Maurice), et en embarquer 517, direction Tamatave (Madagascar).

Au milieu du ballet de grues de 50 mètres de haut et d’engins de manutention, ces femmes qui travaillent sur le quai sautent aux yeux, tant elles restent minoritaires dans les ports, sauf dans les services administratifs. La division du travail très genrée du monde de la mer commence à peine à s’estomper, sous l’effet de la mécanisation de nombreuses tâches et du recul des préjugés et des stéréotypes tenaces.

La passerelle de déchargement du grand port maritime de La Réunion, le 2 octobre 2021.
Des dockeuses participent au déchargement d’un porte-conteneurs sur les quais du grand port maritime de La Réunion, le 2 octobre 2021.

Au sein de la Somacom, une dizaine de femmes, sur un peu plus de 110 dockers, sont employées à des manœuvres sous palan, lors de l’arrimage ou du désarrimage des conteneurs ou des chargements. Une révolution dans cette profession marquée par des rapports virils et régentée par la force physique. « Quand j’ai débuté, il y avait 140 bonshommes autour d’un bateau. Voir des femmes travailler sur les quais, c’était inconcevable », observe Jhonny Semerle, docker entre 1979 et 2020. Ce retraité de 62 ans parle de l’époque pas si lointaine où les journaliers, pieds nus, en short et débardeur, transportaient sur leur tête des sacs de riz de 80 kilos.

En 2007, Isaline Thémyr a été la première femme de son entreprise à travailler sur les quais, d’abord comme ouvrière polyvalente, puis comme « pointeuse » de conteneurs – elle enregistre leurs numéros. Son bac pro obtenu, cette femme de 33 ans a d’abord occupé des postes de comptable. Avant de changer radicalement de carrière. Par choix. Son père docker l’avait informée que son entreprise recrutait. Isaline raconte qu’elle « avait peur », car elle ignorait ce qui l’attendait. Elle savait que c’était « un métier d’homme, avec une mentalité spéciale. [Elle] savai[t] que le ton utilisé était un peu fort, parfois brusque ».

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