Le Centre national du costume de scène de Moulins (Allier) présente, pour la première fois, une exposition en forme de portrait. Il met à l’honneur Yannis Kokkos, costumier et scénographe devenu metteur en scène, qui a commencé au théâtre avant de se consacrer principalement à l’opéra. A travers des dessins, des costumes, des maquettes, le visiteur voyage de l’Antiquité chère à l’artiste franco-grec, né à Athènes en 1944, aux riches heures de notre temps.
Accompagnée d’un beau livre autobiographique (Scènes, Actes Sud, 336 pages, 39 euros), qui revient sur cinquante-cinq ans de carrière et plus de 200 spectacles, l’exposition se clôt, comme une odyssée, par une évocation du Soulier de satin, de Paul Claudel, mis en scène par Antoine Vitez, à Avignon, en 1987, pour lequel Yannis Kokkos avait signé un décor et des costumes inoubliables.
D’où vous vient le goût de la scène ?
J’ai connu et aimé le théâtre par la radio, qui diffusait des pièces que j’écoutais, gamin, à Athènes, dans mon lit. Et je dessinais le décor des pièces que j’entendais. La radio, dans sa réduction, a développé mon imagination. Elle m’a aussi rapproché des acteurs et de l’opéra, d’une certaine manière, à travers les voix, auxquelles je suis très sensible. Puis j’ai vu des spectacles, c’était une grande période du théâtre grec, dans les années 1950. Et je lisais tout. De Stevenson aux textes antiques, un monde de l’aventure et de la poésie s’est ouvert pour moi. Aujourd’hui encore, il est comme un vêtement qui me couvre, et dans lequel je me sens bien.
Vous avez travaillé avec Antoine Vitez, comme scénographe et costumier, dès les années 1970. Que vous a-t-il appris ?
La disponibilité. Il aimait dire qu’il faisait théâtre de tout bois. Contrairement à l’image qu’il pouvait donner, il n’était pas dogmatique, mais très libre dans son approche des œuvres. Pour lui, le théâtre était une école de vie, et je partage totalement ce point de vue. Rien, sauf peut-être la littérature, mais différemment, ne donne cette confrontation intime entre soi et le monde que l’on éprouve au théâtre. A la mort d’Antoine [Vitez], en 1990, j’ai poursuivi mon travail, qui était presque naturellement de signer des mises en scène. J’avais commencé à le faire dans les années 1980, au théâtre. Mais très vite, j’ai été invité à l’opéra, où je travaille essentiellement, depuis vingt ans.
Qu’aimez-vous particulièrement, à l’opéra ?
Voyager, c’est-à-dire connaître vraiment des cultures de l’intérieur, ce que je fais, de la Russie au Japon. Observer les dissemblances, des ateliers de construction à l’approche du chant. Bâtir un spectacle avec des imaginaires différents, mais qui sont réunis par une œuvre. A l’opéra, jamais aucun préalable ne doit exister. Tout est ouvert.
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