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© Marlene Awaad / IP3 - Poitiers, France le 20 octobre 2021 - Permanence du délégué au défenseur des droits, dans une maison de quartier de Poitiers.
MARLENE AWAAD / IP3 POUR «LE MONDE»

« Est-ce qu’il n’y a pas un être humain derrière cette machinerie ? » : au secours des naufragés de la start-up nation

Par  (Poitiers, envoyée spéciale)
Publié le 15 novembre 2021 à 02h01, modifié le 15 novembre 2021 à 16h52

Temps de Lecture 9 min.

Il tient bien serrée entre ses mains l’épaisse pochette en plastique blanc décorée de notes de musique. Tout est là : les papiers à en-tête de différentes administrations, les courriers manuscrits et aussi des photocopies, des enveloppes, des bordereaux de recommandés, chaque dossier soigneusement étiqueté par thèmes ou plutôt par sigles, RSA, APL, AAH, AP-HP. Une vie de misère et de tracas posée sur les genoux. Adam – tous les prénoms ont été modifiés – a 62 ans et les épaules déjà courbées sous une lassitude abyssale. Il passe son temps à s’excuser : « Je n’ai jamais rien demandé à la France, j’ai toujours travaillé. J’étais bien avant, mais là, je sens que je tombe. »

Une assistante sociale lui a conseillé de venir ici, à la Maison pour tous d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), où Alain Mignot, géophysicien à la retraite et ancien syndicaliste, tient sa permanence de délégué au Défenseur des droits, l’organisation administrative indépendante créée en 2011. Adam est si content d’avoir en face de lui « une vraie personne » à laquelle exposer ses difficultés qu’il parle vite, en tremble, fait tomber ses papiers, s’emmêle dans ses explications. Il perçoit 806,34 euros de revenu de solidarité active (RSA) et s’acquitte chaque mois d’un loyer de 800 euros. Alain Mignot, cheveux poivre et sel, polo lie-de-vin et pantalon marine, secoue la tête d’un air accablé en consultant les pièces sorties de la pochette : « Comment peut-on vous laisser vivre avec 6,34 euros par mois ? »

Dans une maison de quartier de Poitiers,  le 20 octobre 2021.

S’il n’avait pas hébergé sa sœur, qui paye leur nourriture et les factures en échange d’une place sur un canapé, Adam se serait retrouvé à la rue. Pourtant, son dossier médical est consistant. Il porte depuis un accident un œil de verre, qu’il montre avec insistance comme s’il craignait qu’on ne le croit pas, et son œil gauche voit de moins en moins bien. Le statut de travailleur handicapé lui a été refusé, et il ne perçoit pas d’allocation logement. Toutes ses demandes de logement social ont été refusées. « Des papiers, j’en ai encore comme ça à la maison, je peux vous les apporter si vous voulez », explique-t-il au délégué en écartant les bras.

Des administrés sur le carreau

Alain Mignot note tout, promet d’écrire un courrier pour appuyer sa demande de prise en compte de son handicap, mais il prévient en soupirant : « La maison départementale pour les personnes handicapées répond souvent au bout d’un an et demi. C’est beaucoup trop long, je sais. » Il fait des doubles des requêtes et l’incite à « continuer à écrire partout ».

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