Un jeu de massacre. S’appuyant sur dix de ses travaux menés depuis 2014, la Cour des comptes a étrillé, jeudi 18 novembre, la gestion des ressources humaines au sein de la police nationale dans une note au constat particulièrement sévère. Ces 23 pages constituent le volet sécurité d’un document consacré aux enjeux structurels pour la France et destiné à informer les citoyens, précise la Cour, « à un moment démocratique-clé ». Pour ce faire, le Palais Cambon ne s’est pas embarrassé de précautions oratoires : hausse exponentielle de la masse salariale, taux d’élucidation médiocre, faible taux de présence effective des policiers sur le terrain, rien ou presque n’est satisfaisant dans ce panorama de l’action publique.
A commencer par une masse salariale en pleine dérive, en hausse de 21 % au cours des dix années passées, soit 90 milliards d’euros. Trois plans de renforts successifs, décidés depuis la vague d’attentats de 2015, n’ont pas permis de rééquilibrer les effectifs : ceux de la sécurité publique, pourtant « cœur de métier de la police », passent ainsi de 51 500 à 46 200 entre 2015 et 2020, soit − 3 %, quand la hausse de ceux affectés à la police des étrangers et des transports aériens est la plus importante de toutes les directions de la police nationale, avec un bond de 14 %, de 11 000 à 14 500 agents sur la même période ( + 31 % au cours des dix années passées).
Pour quels résultats ? Bien peu, compte tenu de la déflation constante de la présence policière relevée sur le terrain, de l’ordre de 37 % en 2020, ou d’un taux d’élucidation uniformément médiocre – à l’exception de la résolution des vols avec violence, qui connaît une nette amélioration de 10,8 % à 15,4 % au cours des cinq dernières années.
« Impasse sécuritaire »
La charge de la Cour des comptes se révèle toutefois particulièrement cinglante à l’évocation des relations entre la Place Beauvau et les syndicats de policiers, jamais nommés mais clairement visés à plusieurs reprises dans sa note. Ainsi, la police connaît-elle « un dialogue social asymétrique qui donne facilement droit aux demandes catégorielles et n’aboutit pas à des contreparties suffisantes, en termes de temps de travail ou de conditions d’activité, aux avantages obtenus ». Dit en des termes moins diplomatiques : la Place Beauvau cède trop souvent aux syndicats, notamment en ce qui concerne les primes, « qui s’ajoutent les unes aux autres, en particulier lorsqu’elles ont pour objectif de fidéliser les agents, sans vérification suffisante de leur efficacité ».
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