« C’est bien de créer des options, c’est encore mieux de les financer ! », s’agace Claire Jourdan, élue SNES-FSU dans un collège rural à Périers (Manche). Lundi 15 novembre, le ministre de l’éducation nationale annonçait dans les colonnes du Point une série de mesures pour la promotion des langues anciennes dans l’enseignement secondaire : le latin sera désormais proposé en première et en terminale technologique – il était jusqu’ici réservé à la voie générale –, et l’option français et culture antique, ouverte aux élèves de 6e de quelque 300 collèges depuis la rentrée, sera étendue. Des sections « Mare nostrum » cumulant langues anciennes, langues vivantes et langues régionales du bassin méditerranéen devraient également voir le jour.
« Dans mon collège, on n’a pas pu offrir l’enseignement français et culture antique en 6e, parce que le ministère n’a pas donné les heures en plus », indique cependant Claire Jourdan, traduisant un sentiment répandu parmi les enseignants : la volonté de Jean-Michel Blanquer de valoriser les langues anciennes, affichée depuis le début du quinquennat, a parfois du mal à se traduire « en actes ».
« Nous avons toujours été sceptiques sur cette option de 6e censée valoriser l’apprentissage du vocabulaire par le biais du latin », pointe à son tour François Martin, enseignant dans l’académie de Créteil et président de la Cnarela, une association d’enseignants de latin et de grec. « Si l’on crée un éveil aux langues anciennes en 6e, il faut pouvoir financer des heures d’option ensuite. » Selon lui, de nombreux collèges « refusent » des candidats aux options latin et grec au début de la 5e, faute de moyens pour ouvrir des groupes.
En cause, un problème structurel de recul des enseignements de latin et de grec : depuis la réforme du collège actée sous la mandature précédente, ces heures d’option, facultatives, sont prises sur la marge horaire des collèges, qui sert aussi à financer des dédoublements de classes ou des projets particuliers. Les enseignants se sentent souvent « sur le fil », toujours susceptibles de voir leurs options disparaître.
Disparition des « points bonus »
Face à ce problème, le ministre de l’éducation nationale a promis qu’un suivi « qualitatif » serait mis en place au niveau académique, pour mieux contrôler la façon dont les établissements dispensent les options latin et grec. Les enseignants, eux, militent pour des heures dites « fléchées », c’est-à-dire réservées au latin et au grec. « Le fait de ne pas flécher les heures est incompréhensible », assure ainsi Robert Delord, président de l’association Arrête ton char et enseignant dans l’académie de Grenoble, qui y voit une « une pure affaire d’arbitrages budgétaires avec Bercy ».
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