Quatre présidents de fédérations sportives invités à dîner chez le premier ministre : la scène est rare. Pas de cravate, à l’exception d’un modèle rouge, unique fantaisie vestimentaire portée par André Giraud, le patron de la Fédération française d’athlétisme. En cette soirée du 7 octobre, Jean Castex souhaite une ambiance décontractée, à l’abri des caméras. Ecouter, afin de tenter de dissiper le malaise. Car, après des Jeux de Tokyo décevants, le sport de haut niveau français a la gueule de bois.
Autour de la table s’installent André Giraud, donc, 74 ans ; Jean-Pierre Siutat, 62 ans, son homologue du basket-ball ; Philippe Bana, 64 ans, qui dirige le handball, et enfin Stéphane Nomis, 51 ans, ancien judoka international. Le plus jeune de la bande, président de la « fédé » de judo, sait, en chef d’entreprise, qu’il est de bon ton de venir avec un cadeau. Il offre à Jean Castex un dossard porté à Tokyo par Teddy Riner, la star des tatamis. Invitées, elles aussi, les patronnes du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), Brigitte Henriques, 50 ans, et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), Marie-Amélie Le Fur, 33 ans, complètent la tablée.
Tour à tour, chacun évoque ses motifs d’inquiétude : baisse du nombre de licenciés en raison de la pandémie, difficultés financières, autonomie des fédérations… Surtout, tous ont en tête l’échéance de Paris 2024. Ces « Jeux du centenaire », un siècle après ceux de 1924 déjà organisés à Paris, et pour lesquels la France a tant bataillé. Pendant deux semaines, le monde entier aura alors les yeux braqués sur la capitale. Chacun sait, autour de la table, qu’en haut lieu la réussite de l’événement sera notamment jugée à l’aune du nombre de médailles récoltées. Un critère peut-être réducteur, mais qui s’impose à tous. Même si, bien sûr, l’organisation, la qualité des infrastructures compteront également dans le bilan final.
Il n’empêche : comme on mesure la santé économique d’un pays à son PIB, le poids des métaux fait office de thermomètre aux JO. Et la moisson de Tokyo, avec 33 podiums – pire bilan depuis les JO de Barcelone, en 1992 –, s’avère très inquiétante. Sauf miracle, l’objectif d’intégrer le cercle des cinq nations les plus médaillées, le fameux « top 5 » fixé par Emmanuel Macron, ne sera pas atteint. Tout le monde le sait, mais personne n’ose le dire trop fort. S’il est réélu en mai, le chef de l’Etat aimerait évidemment éviter le camouflet d’une clôture de « ses » Jeux plombée par un bilan sportif catastrophique.
Il vous reste 87.85% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.