« Une pression et une paire de chaussettes, s’il vous plaît ! » A Roubaix, au bar Les Trois Tricoteurs, comptez moins de cinq minutes pour voir tricotée sous vos yeux une paire de socquettes en coton bio d’Egypte, filé et teint en Italie, laine mérinos et polyamide recyclé d’Espagne – « pour ajouter tenue et résistance », précise le barman tricoteur. « Vous choisissez vos socquettes sans coutures parmi les sept modèles et treize couleurs, et on fabrique à la demande », poursuit Victor Legrain, l’un des trois jeunes cofondateurs de cet atelier de tricotage zéro déchet.
A deux pas du célèbre musée La Piscine, ce nouveau tiers-lieu est l’un des symboles du renouveau de la mode durable et locale de Roubaix. Juste le temps de boire une bière brassée dans les environs et voilà la paire de chaussettes personnalisable, fabriquée à la demande, pour 6 à 15 euros. En vingt minutes, vous pouvez repartir avec un pull made in Roubaix, tricoté sur une machine italienne automatisée, qui permet de réduire de 20 % à 2 % les déchets textiles. « On est rentables car on produit peu, uniquement à la demande, et qu’il n’y a pas d’intermédiaire », expliquent Victor et ses collaborateurs, tous ingénieurs sortis de l’Ecole nationale supérieure des arts et industries textiles, située sur le trottoir d’en face. Bien décidé à exporter son concept partout dans l’Hexagone, le trio invite à produire moins, mais mieux.
Relancer le « made in France » à travers des produits écoresponsables, c’est l’histoire que la ville de Roubaix veut écrire à travers son opération de communication Roubaix rembobine. « Cela fait quarante ans qu’on a fermé nos usines, mais le textile n’a jamais disparu de Roubaix, estime Frédéric Minard, adjoint au maire délégué au développement économique. On a gardé des ateliers de production, le savoir-faire, la vente par correspondance, l’e-commerce, les écoles spécialisées… » Mi-juin, c’est à Roubaix que l’Union des industries textiles & habillement Nord a lancé son projet de Textile Valley pour accélérer le phénomène de réindustrialisation en cours dans les Hauts-de-France. Objectif : relocaliser 1 % de la production textile en France, ce qui reviendrait à créer 4 000 emplois.
C’est sur ce terreau fertile que s’est bâtie l’ambition d’une centaine d’acteurs du secteur textile roubaisien (créateurs, ateliers de confection, chercheurs, distributeurs, écoles, fournisseurs de tissus, etc.). Une aspiration accélérée par la crise due au Covid-19. En mars 2020, la France confinée cherche des masques. Dans l’urgence, un atelier de confection de 900 mètres carrés voit le jour, le 3 mai, au 156, rue de l’Industrie.
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