Les vitraux de la jolie petite église Saint-Bernard-du-Mont-Blanc, au cœur de Chamonix, en Haute-Savoie, datent de 1925. Loin des images pieuses habituelles, ils forment une sorte de bande dessinée où des skieurs et un bobsleigh dévalent les pistes, et où des guides, bonnets rouges et guêtres bandelées, gravissent la montagne en ouvrant la voie à un touriste élégant, que l’on suppose anglais, en costume bleu et feutre vert. Sur le parvis même de l’église, voici le bureau des guides. Tous les 15 août, la bénédiction des cordes et des piolets reste le moment le plus important de leur fête annuelle.
Pour une balade au Buet, dans le vallon de Bérard, le soleil est de retour. La forêt d’épicéas est splendide sous l’épaisse couche de neige scintillante.
Cet été, la fête était encore plus belle puisque la Compagnie des guides de Chamonix célébrait ses 200 ans. Covid oblige, l’année 2021 avait pourtant mal commencé. L’hiver dernier, faute de remontées mécaniques, de nombreux skieurs avaient renoncé à la montagne. Heureusement, ceux qui étaient venus avaient envie de découvrir d’autres activités. Paradoxalement, ce fut une bénédiction (une de plus !) pour la Compagnie, l’occasion unique pour cette institution, qui rassemble des guides de haute montagne – pour les sorties en milieu glaciaire, en ski de randonnée ou en alpinisme – et des accompagnateurs en montagne – proposant des sorties naturalistes en raquettes –, de faire découvrir la montagne à des non-initiés.
La météo annonce « grand mauvais », mais il fait juste mauvais ce matin-là. Tristan Knoertzer, membre de la Compagnie des guides de Chamonix, guide de haute montagne et chef de projet des 200 ans, sera notre initiateur pour une première expérience de ski de randonnée. A cinq minutes du centre de Chamonix, nous ajustons nos peaux de phoque sous le Brévent, face à la piste des Nants. Nous sommes à 1 200 mètres, et nous allons monter en zigzaguant jusqu’à 1 700. Pendant l’ascension, qui promet d’être longue, Tristan Knoertzer explique comment fonctionne la compagnie.
« C’est un long parcours pour devenir guide de haute montagne, lance-t-il. Jeune, tu commences comme renfort – tu prends le travail qui reste. Le guide chef te teste comme ça pendant deux ans. Puis tu dois demander par courrier à devenir renfort prioritaire, et plus tard encore stagiaire. » Puis le comité directionnel de la compagnie vote, en fonction de dix-sept critères, notamment le savoir-faire, le savoir-être, la connaissance et l’implication du candidat dans le tissu social de la vallée.
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