Quarante-deux mètres carrés, cuisine équipée, séjour, chambre à l’étage, salle de bains indépendante, jardin et parking pour un loyer de 350 euros, Internet inclus. Le tout dans une bâtisse en briques rouges érigée en 1869. Un agent immobilier ajouterait qu’elle ne manque pas de cachet. Mais pour trouver cette annonce alléchante, inutile de passer par un courtier : frappez plutôt à la porte d’un fermier. Le bien se situe au sein d’une exploitation agricole et il est mis en location par Campus vert.
L’association rapproche des agriculteurs et des étudiants en quête de logement, pour un marché « gagnant-gagnant ». Les exploitants valorisent leur patrimoine et s’assurent un revenu complémentaire. Les jeunes sont logés à quinze ou vingt minutes de leur école, université ou lieu de stage, pour un loyer de 20 % à 30 % moins cher qu’en ville. Fondé en 1995 par trois producteurs du Pas-de-Calais, le réseau a accueilli près de 20 000 locataires depuis son lancement. La passion des étudiants pour les champs s’est accrue au gré des confinements, révèle Odile Colin, directrice de l’association : « Nos logements sont toujours complets. Mais à la rentrée universitaire 2021, ils sont partis encore plus vite que d’habitude : début août, contre courant septembre habituellement, tout était réservé. »
Ambre Garenq, 22 ans, loge dans une ancienne grange au sein d’une exploitation agricole de Beuvry, dans le Pas-de-Calais. En dix minutes de voiture, elle rejoint le fournisseur d’excipients pharmaceutiques Roquette, où elle est en stage. « Lors du dernier confinement, j’étais seule dans un appartement en ville, j’ai passé quasiment quatre mois sans voir personne. Ici, quoi qu’il arrive, je peux prendre l’air et je suis entourée. Cet été, quand un clou s’est enfoncé dans le pneu de ma voiture, ce sont les propriétaires qui m’ont tirée d’affaire », raconte l’étudiante en école de commerce.
« Il y a de la vie à la ferme »
La ferme appartient à la famille Soudan, pionnière de cet hébergement champêtre. « Dans les années 1990, la décentralisation des universités a entraîné un afflux d’étudiants dans les villes moyennes qui n’étaient pas prêtes pour les loger. Au même moment, un changement de normes rendait certaines installations agricoles inutilisables », retrace Odile Colin. Ainsi, lorsque Marie-Christine Soudan s’installe avec son mari sur l’exploitation de ses beaux-parents, en 1983, elle découvre des étables à l’abandon. Les huit vaches ne sont plus rentables, et la famille n’a ni les moyens ni l’envie de passer à la vitesse supérieure.
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