Sur l’emblématique Canebière, les feuilles charnues ont remplacé les feuilles de papier journal. En décembre 2021, Christian Cô a posé ses Drôles de plantes entre les quatre murs d’un ancien kiosque à journaux, au 111 de la célèbre artère marseillaise. Dans ces 15 mètres carrés qu’il a totalement réaménagés, le long des murs fraîchement repeints en rose poudré et bleu-vert, s’alignent une multitude de belles plantes dans de petits pots en terre cuite ou dans des cache-pots personnalisables.
Fermée pendant trois ans, la petite échoppe sur trottoir a conservé de l’extérieur sa frise festonnée, surmontée d’un dôme en écailles de zinc, et son habillage vert sapin caractéristique, mais, en lieu et place de la presse, le chaland peut y acheter cactus et plantes grasses. L’ancien prothésiste dentaire, qui, « à la quarantaine, [s’est] vu finir [sa] vie entre les néons et les molaires en résine », a pris un virage à 180 degrés et a offert au kiosque délaissé une nouvelle jeunesse.
Des fleurs, des bijoux, du café, des glaces, du pain, des fruits et légumes, une manucure… A Marseille, d’anciens kiosques à journaux sont ainsi devenus de petits magasins de proximité. Nés en 1857 à Paris, sur les grands boulevards haussmanniens, débordant de titres et ouverts quasiment tous les jours de l’année, ces lieux de vente, confiés à l’origine aux veuves de militaire ou de fonctionnaire pour qu’ils leur procurent un petit revenu, ont vécu l’expansion puis le déclin de la presse papier. Les départs à la retraite non renouvelés, de trop faibles revenus et, plus récemment, le Covid-19, avec le développement du télétravail et des piétons moins nombreux, ont accéléré leurs difficultés.
Une expérimentation qui s’étend
Il y a deux ans, la Métropole Aix-Marseille-Provence a lancé une série d’appels à projets pour encourager leur reconversion. Il s’agissait de « redynamiser le centre de Marseille, d’offrir des services de proximité et de recréer du lien social dans les différents quartiers », précise un de ses porte-parole.
« Je n’aurais pas eu les moyens d’investir dans un “vrai magasin” », indique Christian Cô, fleuriste
Dans la cité phocéenne, seuls 41 kiosques, sur les 53 appartenant à la Métropole mais exploités par MédiaKiosk, filiale de JCDecaux, fonctionnent encore. La moitié continue de vendre de la presse, l’autre moitié est passée à tout autre chose. Onze sont totalement fermés, et un est en cours d’attribution. Une expérimentation qui commence à essaimer ailleurs. « Sur notre parc de 770 kiosques implantés à travers la France, 142 proposent désormais des services en dehors de la vente de presse, une transformation menée systématiquement en concertation avec les villes », précise Marc Bollaert, directeur général de MédiaKiosk.
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