Publicité

Trois pistes pour accroître la mixité des lycées Louis-le-Grand et Henri-IV

Un mois après avoir annoncé la suppression, pour les élèves parisiens, du recrutement sur dossier pour les prestigieux lycées Louis-le-Grand et Henri-IV, l'académie de Paris planche notamment sur un quota de boursiers de l'ordre de 15 %. Un bonus pourrait être accordé aux élèves déjà scolarisés au collège Henri-IV.

Au lycée Louis-le-Grand.
Au lycée Louis-le-Grand. (Olivier Coret/SIPA)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 21 févr. 2022 à 17:08Mis à jour le 22 févr. 2022 à 09:04

Rien n'est encore officiel mais plusieurs pistes sont déjà sur la table pour régler la question sensible du recrutement des prestigieux lycées Henri-IV et Louis-le-Grand . Le rectorat de Paris avait annoncé, fin janvier, son souhait de supprimer le recrutement par dossier des élèves parisiens, dès la rentrée prochaine, au profit de l'algorithme Affelnet. Depuis, les critiques se sont multipliées, à coups de tribunes et de pétitions mêlant élèves, anciens élèves, parents ou enseignants.

L'académie de Paris veut faire entrer davantage d'élèves boursiers dans ces deux établissements pour « élargir l'élite ». Les opposants à la réforme, eux, redoutent « un nivellement par le bas » et « une fuite des familles vers le privé ». Ils dénoncent le caractère « opaque » de l'algorithme Affelnet là où Julien Grenet, professeur associé à l'Ecole d'économie de Paris et président du comité de suivi de la réforme Affelnet à Paris, balaie ces arguments à partir de différentes simulations (1).

« Se priver de potentielles médailles Fields »

« On est très inquiets », témoigne Bruno Bensaïd, élu FCPE du lycée Louis-le-Grand et porte-parole du collectif « Sauvons le mérite », opposé à la réforme. « Un élève qui a 19 en mathématiques et 12 en EPS va se retrouver défavorisé par rapport à celui qui aurait 15 dans les deux matières, explique-t-il. De quoi passer à côté de profils atypiques et se priver de potentielles médailles Fields. »

Publicité

« Ce n'est pas un concours, c'est une affectation, s'agace Claire Mazeron, directrice académique des services de l'Education nationale chargée des lycées. Ou alors il faudrait ne réserver ces deux lycées qu'aux seuls élèves qui ont 18 de moyenne… »

Après un mois de vifs débats, la première piste est celle des quotas d'élèves venant de collèges socialement divers, selon leur indice de positionnement social. Cet « IPS » est établi à partir de la profession des parents d'un établissement. Ces quotas pourraient se calquer sur la répartition des élèves de seconde de l'académie de Paris, tous lycées confondus : 40 % des élèves affectés venant de collèges favorisés, 35 % de collèges intermédiaires et 25 % de collèges défavorisés.

« Libérer l'autocensure »

Mais l'établissement de tels quotas, envisagé fin janvier, n'est plus certain. La disparition du processus de recrutement sur dossier pourrait permettre au rectorat de s'en passer. « Ce qui posait problème dans l'origine des collégiens entrant à Louis-le-Grand et Henri-IV, c'est que les élèves qui venaient des collèges moins favorisés ou intermédiaires n'y postulaient pas, explique Claire Mazeron. Or, si le fait d'avoir uniquement le voeu à faire [via Affelnet, au lieu d'avoir à constituer un dossier, NDLR] libère une forme d'autocensure, on n'aura pas besoin de quotas. Ce serait l'idéal. » La décision ne devrait pas être connue avant juin, lors de la publication de l'arrêté d'affectation.

La deuxième piste à l'étude vise à imposer un quota de boursiers de 15 %, voire plus, là où le taux de boursiers est, selon le rectorat, de 8 %, contre 22 % en moyenne dans l'académie.

« Un petit bonus »

La troisième piste, défendue par Gilles Le Gendre, député LREM qui a les deux lycées dans sa circonscription, suggère d'appliquer un « Affelnet bis » avec des aménagements par rapport « à l'Affelnet de droit commun ».

Le taux de boursiers passerait de 8 à 15 ou 16 %, avec l'objectif de rejoindre à terme la moyenne académique de 22 %. Et le député souhaite que les collégiens déjà scolarisés à Henri-IV bénéficient d'« un bonus ». « Cela ne me choque pas du tout que des collégiens qui y ont fait toutes leurs études, de la 6e à la 3e, qui sont connus pour la qualité de leurs notes, pour leur comportement, aient un petit bonus, que l'Affelnet pur et dur ne leur permettrait pas d'obtenir », indique-t-il aux « Echos ». « C'est là-dessus que j'ai souhaité que le rectorat travaille », ajoute-t-il… tout en insistant sur l'importance d'avoir davantage de « mixité » dans les deux établissements pour éviter d'en « faire deux lycées qui seraient en extraterritorialité totale ».

Ce « petit bonus » ne risque-t-il pas justement de renforcer ce sentiment d'« extraterritorialité » ? « C'est le propre d'un compromis, d'une ligne de crête, il ne peut pas satisfaire tout le monde à 100 % », défend Gilles Le Gendre. A quelques semaines de l'élection présidentielle et des législatives, il regrette aussi un calendrier « qui n'est pas ultra bien choisi électoralement parlant ».

« Surreprésentation »

« Cette idée de bonus pour les élèves du 5arrondissement est assez choquante, estime Bruno Bensaïd. Cela ne correspond en aucun cas à notre définition de l'excellence. » Julien Grenet a, lui, dénoncé « le traitement préférentiel dont bénéficient les élèves du collège Henri-IV lors de l'examen des dossiers de candidature pour le lycée du même nom », alors que 26 % des 191 élèves parisiens de cet établissement sont originaires du 5e arrondissement. Cette « surreprésentation paraît difficile à justifier sur le seul fondement du mérite scolaire », affirme-t-il, alors même qu'ils réussissent moins bien au bac que les élèves issus d'autres collèges publics.

Publicité

(1) Voir l'article publié dans « La Vie des Idées ».

Marie-Christine Corbier

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité