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Décryptage

Comment Emmanuel Macron veut chambouler les lycées professionnels et l'orientation

Plus d'autonomie, une présence accrue des entreprises dans les établissements scolaires, une réforme profonde du lycée professionnel et une consolidation des savoirs fondamentaux : le président sortant a dessiné les grandes lignes de son projet pour l'éducation.

Emmanuel Macron, à Poissy (Yvelines), lundi soir.
Emmanuel Macron, à Poissy (Yvelines), lundi soir. (Reuters/Benoit Tessier)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 8 mars 2022 à 13:29Mis à jour le 8 mars 2022 à 18:58

On savait que le candidat Macron voulait mettre l'école en tête de ses priorités. On en sait désormais un peu plus sur son programme. Au coeur des mesures qu'il envisage figure un rapprochement entre l'école et les entreprises. Avec, d'abord, « la grande réforme du lycée professionnel » - « un immense chantier », pour reprendre son propos, lundi soir, à Poissy.

« Nous devons réformer le lycée professionnel sur le modèle de ce qu'on a fait pour l'apprentissage », a-t-il estimé. Le président sortant veut « un partenariat beaucoup plus étroit avec les entreprises » et des lycéens professionnels « rémunérés pour leur temps d'entreprise comme le sont les apprentis ». C'est l'Etat qui « assumera cette gratification », précise son équipe de campagne. Qui assure que l'intention, contrairement à la candidate LR Valérie Pécresse, n'est pas de confier l'enseignement professionnel aux régions.

« Trop de filières » sans débouchés

Emmanuel Macron établit un tri entre les filières qui débouchent sur un emploi et les autres, en estimant qu'il y a « trop de jeunes qui sortent avec un diplôme mais pas d'emploi ». « On laisse vivre trop de filières où il n'y a quasiment pas de débouchés », souligne-t-il.

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La moitié des bacs gestion-administration, critiqués pour leur manque d'insertion professionnelle, ont déjà été transformés en sections commerce-vente ou logistique-transports, rappelle Pascal Vivier, à la tête du SNETAA-FO, principal syndicat de l'enseignement professionnel. Il faut « intensifier le mouvement » enclenché pendant le quinquennat, fait savoir l'équipe de campagne du candidat.

« On n'arrête pas de dire qu'il faut créer de nouveaux diplômes, de nouveaux débouchés liés aux métiers du présent et de l'avenir, réplique Pascal Vivier. Mais nous avons, par exemple, réclamé en vain depuis cinq ans des diplômes tels qu'un CAP sur le grand âge, qu'on nous a refusé alors que les besoins existent ! » Le syndicaliste évoque a contrario France Compétences, « qui a validé l'année dernière quelque 1.400 diplômes et certifications reconnus, alors qu'en cinq ans, nous n'avons obtenu qu'une révision de quelques-uns de nos diplômes. »

Au lycée, le retour des mathématiques pour tous

Emmanuel Macron entend « remettre » des mathématiques dans le tronc commun du baccalauréat, « toutes spécialités confondues ». C'est l'une des premières annonces sur l'éducation qu'il a faite, lundi soir, après la vive polémique qui porte sur l'enseignement de cette discipline au lycée. « On a besoin de renforcer nos enseignements en mathématiques » au collège et au lycée, a-t-il insisté. « C'est l'un des points qui ressort très fortement des évaluations qu'on a pu faire et des choses qu'on doit pouvoir corriger, renforcer. »

« Sanctuariser » l'orientation dès la 5e

« Le deuxième grand chantier en lien avec les entreprises » porte sur l'orientation. « Il faut mettre en face de nos jeunes des gens qui pratiquent un métier, c'est ce dont on a besoin pour aller vers le plein-emploi », argumente Emmanuel Macron. Qui veut « sanctuariser » une demi-journée par semaine pour tous les collégiens, de la cinquième à la troisième. Elle aurait vocation à couvrir « l'ensemble des compétences numériques, l'enseignement d'un savoir manuel et pratique en lien avec le monde professionnel », selon l'entourage du candidat.

Les élèves pourraient aussi se rendre dans les entreprises proches de leur collège, pour découvrir des métiers. Cette demi-journée serait créée en transformant l'enseignement actuel de technologie, sans ajout d'heures.

Emmanuel Macron glisse au passage que l'orientation ne relève pas de la mission des enseignants : « Ils ne sont pas celles et ceux qui sont le plus en contact avec la variété des métiers et des besoins dans les différents champs économiques, a-t-il expliqué. Ils connaissent leur discipline, leur métier d'enseignant, on ne peut pas leur demander de faire cela. »

Réorganiser l'école

L'autre grand axe des réformes concerne la réorganisation de l'école. Emmanuel Macron veut « consolider » les savoirs fondamentaux, il entend aussi ouvrir l'école sur l'extérieur - aux parents, aux associations, aux collectivités - pour « bâtir le pacte républicain ».

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Pour cela, il mise par exemple sur le sport, avec l'aide des associations. Il a dit vouloir y consacrer une demi-heure par jour à l'école. Le « pacte » républicain, « ça ne commence pas le matin à 9 heures pour s'arrêter à 17 heures, quatre ou cinq jours par semaine ». « La bataille est là », a-t-il insisté.

« Répondre » aux attentes des parents

Emmanuel Macron veut « décloisonner encore davantage [l']école », « réinventer [son] organisation » par le périscolaire, avec les communes et donc « responsabiliser le local ».

La conséquence, c'est aussi plus d'autonomie et « plus de marge de manoeuvre » pour les équipes pédagogiques sur le terrain, dans l'esprit des annonces faites pour certaines écoles de Marseille, en septembre. Il n'est pas question de remise en cause des programmes, insiste-t-on dans l'entourage du candidat, « notre éducation est nationale et doit évidemment le rester. Mais il faut donner la liberté aux acteurs de terrain de définir des projets, d'enrichir l'offre éducative, d'accroître les liens avec les partenaires de l'école. »

Cette réorganisation de l'école se ferait « en dialogue avec les familles, les associations et les communes qui s'occupent du périscolaire », a ajouté Emmanuel Macron. L'objectif : « donner les moyens de répondre à ce que les parents attendent », y compris pour qu'un directeur d'école ou un chef d'établissement puisse, « d'une journée l'autre, remplacer un enseignant qui va être absent ». Encore faudra-t-il susciter l'adhésion des professeurs. « Emmanuel Macron a un socle assez fort partout, sauf chez les enseignants, admet un proche du candidat. Il faut retrouver cette base électorale qui était la nôtre. »

Marie-Christine Corbier

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