C’est un rendez-vous désormais bien connu : le 23 mars, comme chaque année, l’éducation nationale met en ligne ses indicateurs de valeur ajoutée des lycées (IVAL). Sur la base des résultats au baccalauréat, les IVAL comparent les établissements de même profil pour évaluer leur capacité à accompagner leurs élèves jusqu’à l’examen. Ces indicateurs sont l’un des multiples thermomètres dont dispose l’éducation nationale pour mesurer ses propres performances. Ils sont publics et font bien souvent l’objet de « tableaux d’honneur » et autres palmarès dans la presse – à rebours, parfois, de ce que l’éducation nationale voudrait mettre en valeur, puisque les taux « bruts » de réussite et de mention mettent en avant les lycées privés.
Les IVAL sont symptomatiques du rapport complexe qu’entretient l’école française avec l’évaluation. Le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, a fait du pilotage par l’évaluation un véritable mantra. L’un des objectifs assumés est de briser l’effet de surprise des évaluations internationales, dans lesquelles la France a eu tendance à « redécouvrir » régulièrement ses piètres performances. « Briser le thermomètre n’a jamais fait baisser la température », écrivait ainsi Jean-Michel Blanquer dans son livre Construisons ensemble l’école de la confiance (Odile Jacob, 2018), où il plaidait pour une évaluation « moteur de progrès ».
Des tests standardisés ont ainsi vu le jour en CP, CE1 et 6e pour mesurer, entre autres, les effets de la politique de dédoublement des classes, mise en place dès le début du quinquennat. Mais Jean-Michel Blanquer a également créé un Conseil d’évaluation de l’école, inscrit dans la loi pour une école de la confiance de 2019, qui vient de finir d’évaluer 950 établissements du secondaire, en majorité des collèges, sur des sujets aussi divers que le bien-être des élèves, le bâti scolaire et les relations des enseignants avec leur hiérarchie. Le président candidat, Emmanuel Macron, a déclaré, lors de la présentation de son programme, le 17 mars, qu’il souhaitait rendre publiques ces évaluations qui concerneront, à terme, l’ensemble des écoles et établissements secondaires.
Résistance de la part des enseignants
Le système dispose pourtant d’outils d’évaluation depuis longtemps. Les suivis de cohorte existent depuis 1973 et les tests standardisés depuis 1989. « Publier des résultats d’évaluations d’élèves, cela fait trente ans qu’on en parle, rappelle un ancien recteur, qui préfère ne pas donner son nom. Ce qui est nouveau, c’est d’en faire chaque année, comme c’est le cas aujourd’hui en CP et CE1, et de s’en servir à des fins de communication pour dire que le niveau s’améliore. Sur des temporalités aussi courtes, ça n’a que peu d’intérêt scientifique. »
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