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Pour Arnaud Gossement, il faut plus de juristes dans les ministères et préfectures

L'avocat spécialisé en droit de l'environnement estime qu'il est de plus en plus compliqué et long d'implanter de l'activité économique sur un territoire. La faute notamment, selon lui, du manque d'effectifs de fonctionnaires pour instruire les projets. Il appelle à une réelle simplification du droit.

L'avocat a conseillé un projet d'éolienne qui a connu dix ans de recours.
L'avocat a conseillé un projet d'éolienne qui a connu dix ans de recours. (iStock)

Par Matthieu Quiret

Publié le 17 mars 2022 à 11:29

Le cabinet de l'avocat Arnaud Gossement, spécialiste du droit de l'environnement, conseille les institutions et les entreprises dans le domaine de l'énergie, des déchets de l'économie circulaire, etc. Il livre aux « Echos » ses propositions pour simplifier l'implantation d'activités économiques.

Les mesures prises par le gouvernement l'été dernier simplifient-elles les procédures ?

Pas suffisamment. Les tentatives de simplification du droit de l'environnement souffrent de plusieurs défauts. Les gouvernements successifs simplifient par petites touches, par des mesures ponctuelles, sans vision d'ensemble du droit et, trop souvent, sans tenir compte du droit de l'Union européenne.

Pire, ces mesures de simplification aboutissent souvent à plus de complexité ! Prenons l'exemple de la réforme du « silence de l'administration vaut accord », voulue par le président Hollande. A l'arrivée ce principe simple a été accompagné… de milliers d'exceptions ! La réforme a produit l'effet inverse de celui recherché et cette tentative de simplification est devenue un monument de complexité .

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La réalité pour mes clients est qu'il y a de plus en plus de normes, dont le contenu est de plus en plus compliqué et qui sont corrigées ou remplacées à peine publiées au 'Journal officiel'. Cette complexité du droit est notamment due au souci des acteurs économiques d'anticiper tous les risques et à un manque de confiance entre eux.

La réforme a produit l'effet inverse de celui recherché.

Cette peur du risque et ce manque de confiance se traduisent aussi par des contrats de plus en plus longs. Les contrats de vente d'un site possiblement pollué ou de réalisation d'une opération d'économie d'énergie atteignent facilement la centaine de pages sans compter les annexes. A cette complexité des normes et des contrats s'ajoutent des procédures en justice parfois si longues que le projet va parfois mourir avant même que le juge ne se prononce définitivement. Comme avocat, j'ai déjà travaillé sur un parc éolien qui a connu dix ans de contentieux. Je suis devenu la mémoire du projet, toutes les équipes travaillant dessus ayant changé entre-temps.

Arnaud Gossement

Arnaud GossementDR

Quelles conséquences a cette complexité croissante ?

La complexité du droit dessert certains projets pourtant favorables à l'environnement comme la production d'énergie renouvelable. Elle crée aussi une distorsion de concurrence entre les entreprises qui ont les moyens de faire appel à des services juridiques et ceux comme les TPE et les PME qui ne peuvent pas. L'expertise juridique est devenue un instrument de compétitivité indispensable pour les entreprises.

La complexité du droit créé une distorsion de concurrence entre les entreprises.

Que proposeriez-vous pour raccourcir les délais d'autorisation ?

Première proposition : on a d'abord besoin de fonctionnaires ! Ce n'est pas très à la mode de dire cela mais pour réduire la durée des procédures d'autorisation ou mieux informer les entreprises qui n'ont pas de service juridique mais souhaitent pourtant déposer des demandes d'autorisation : il faut bien plus de juristes dans les ministères et préfectures. Nous attendons souvent trop longtemps les réponses de l'administration pour cette raison.

Alors que je suis un juriste spécialisé j'ai du mal à lire certains textes.

Deuxième proposition : compiler les multiples plans et schémas (PLU, SRADDET, SDAGE etc.) que doivent respecter les porteurs de projets en un « schéma régional unique ». Nous avons déjà une procédure d'autorisation environnementale unique depuis 2017 : pourquoi ne pas créer un schéma régional unique ? Troisièmement : anticiper. Il est indispensable que l'Etat nous informe sur le contenu, non seulement des normes existantes mais aussi des normes à venir, notamment européennes. Et ce pour permettre aux entreprises et aux citoyens de se préparer. Quatrième proposition : mieux rédiger les normes. Alors que je suis un juriste spécialisé j'ai du mal à lire certains textes : j'imagine ce que cela doit être pour un non-juriste !

Matthieu Quiret

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