Publicité
Tribune

Opinion | La formation au numérique, grande cause du quinquennat ?

La mise sur pied de la Grande Ecole du numérique a répondu, pour partie, aux défis de la troisième révolution industrielle, au travers d'un label d'excellence. Mais, explique Guy Mamou-Mani, nous sommes encore loin du compte, car il faudrait former 50.000 informaticiens chaque année pour répondre aux besoins du marché.

Les locaux de l'école d'ingénieurs en informatique Epita.
Les locaux de l'école d'ingénieurs en informatique Epita. (DENIS/REA)

Par Guy Mamou-Mani (coprésident Groupe Open)

Publié le 8 avr. 2022 à 11:30Mis à jour le 27 avr. 2022 à 11:03

Lors des campagnes pour les présidentielles de 2012 et 2017, aucun des candidats n'avait inscrit la question de la transformation numérique au coeur de son programme ni fait de la formation un des axes forts de sa campagne.

Emmanuel Macron a pour sa part, pendant la campagne 2022, esquissé la vision de la formation avec deux idées maîtresses : l'orientation vers des filières professionnalisantes et la fin de la gratuité des formations.

Ces questions d'orientation, de professionnalisation et de financement soulevées à juste titre par celui qui était alors un président-candidat sont au coeur du malaise qui règne dans l'enseignement supérieur français. Des voix ont pu s'élever pour dénoncer sa volonté de « privatiser » l'université française, les droits d'inscription n'en jouent pas moins un rôle crucial dans la régulation du système. Leur montant explique pour une très large part les écarts qui se creusent entre les formations dispensées dans le supérieur public et le privé et leur capacité respective à former en nombre suffisant les ingénieurs dont la France a besoin.

Il faudrait former 50.000 informaticiens par an

Publicité

La mise sur pied de la Grande Ecole du numérique (GEN) répond pour une part aux défis de la troisième révolution industrielle au travers d'un label d'excellence. 500 formations aux métiers du numérique ont été identifiées et sont aujourd'hui labellisées GEN. 31.000 personnes ont bénéficié de ces formations depuis 2016. Mais nous sommes encore loin du compte quand on sait qu'il faudrait former tous les ans entre 40.000 et 50.000 informaticiens pour être en phase avec les besoins du marché.

On peut d'ailleurs légitimement se demander pourquoi l'Etat français n'a pas accru les moyens de ses meilleures écoles d'ingénieurs publiques du numérique. Elles ont vu les subventions qui leur étaient allouées s'éroder régulièrement, leur budget de fonctionnement drastiquement diminué. Quant aux droits de scolarité - qui s'élèvent aujourd'hui à 3.500 euros par an à CentraleSupélec et à 2.800 euros par an à Télécom Paris alors que l'année-élève coûte entre 15.000 et 20.000 euros -, ils sont notoirement insuffisants.

Force est de reconnaître que l'université française et nos grandes écoles souffrent d'un mal endémique. Leur sous-financement chronique ne leur permet pas de dégager les ressources leur permettant de faire croître leur flux de diplômés de plus de 10 % sans baisser le niveau des étudiants, ce qui serait inéluctable avec le taux d'encadrement qui est le leur. L'augmenter conduirait à creuser leur déficit.

L'Epita a vu ses effectifs croître de 40 %

Pour autant, toutes les écoles d'ingénieurs ne pâtissent pas des mêmes difficultés. Le malthusianisme que connaît l'enseignement supérieur public a créé un effet booster pour l'enseignement supérieur privé en général et particulièrement dans le numérique, qui a vu ses écoles d'ingénieurs croître tant en nombre qu'en flux de diplômés.

L'enseignement supérieur privé est en plein essor. Une école du numérique comme l'Epita qui garantit une formation professionnalisante à ses étudiants a vu non seulement ses effectifs croître de 40 % ces dernières années mais arrive même en tête du classement 2020 de « L'Usine nouvelle » devant Polytechnique (meilleurs salaires de sortie).

Il y a un rapport entre la rentabilité d'un système de formation et les effectifs. Mathias Emmerich, président exécutif d'Inseec U, l'a bien résumé : « La principale façon de gagner de l'argent, c'est d'augmenter les effectifs. Les pouvoirs publics seraient bien inspirés d'en tirer la leçon et d'investir dans l'enseignement supérieur public français du numérique dans l'intérêt économique du pays qui s'appauvrira sans ingénieurs. »

Même si tous les candidats de la dernière présidentielle ne se sont pas saisis de ce sujet, en ont sous-estimé l'importance et n'ont pas inscrit la formation au numérique parmi leurs priorités, il y va de notre avenir !

Guy Mamou-Mani est coprésident du groupe Open, ancien président de Syntec Numérique et vice-président du CNNum.

Guy Mamou-Mani

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité