Non seulement les agriculteurs français devront nourrir le pays, mais ils pourraient aussi l’aider à se passer du gaz russe. Voilà en substance, depuis l’éclatement du conflit en Ukraine, le récent message de la filière du biogaz pour inciter à accélérer son déploiement. Le biométhane est un « gaz vert », produit en particulier à partir de déchets agricoles. Une énergie renouvelable dix fois moins émettrice en carbone que le gaz fossile, font valoir ses promoteurs… Mais une solution contestée pour ses nuisances, notamment olfactives, voire pour ses risques sur l’usage des terres.
Pour l’heure, la France compte surtout des méthaniseurs pour transformer de la matière organique en électricité ou en chaleur (945 en 2021). Beaucoup moins pour injecter du biométhane dans son réseau gazier, bien que la tendance s’accentue (365 depuis une décennie, dont 151 au cours de l’année écoulée).
De même qu’en Allemagne, ce « gaz vert » représente toujours une part minimale de la consommation gazière en France : 0,92 % en 2021. C’est-à-dire une production de 4,3 térawattheures (TWh), selon le dernier « panorama des gaz renouvelables », édité par diverses organisations de la filière. Soit presque le double par rapport à 2020.
Compenser en partie les livraisons russes
A l’inverse de l’éolien ou du solaire, le biogaz paraît bien parti pour atteindre les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de l’énergie – d’autant que la version de 2020 a revu ceux-ci à la baisse. La feuille de route gouvernementale prévoit 6 TWh de biométhane à injecter en 2023, et entre 14 TWh et 22 TWh d’ici à 2028. Avec l’intention de parvenir jusqu’à 7 % de la consommation « en cas de baisse de coûts de production » à l’horizon 2030, voire jusqu’à 10 % « en cas de baisse de coûts supérieure ». De quoi compenser en partie, selon les projections optimistes, les livraisons en provenance de Russie, deuxième fournisseur gazier du pays derrière la Norvège, avec 17 % des importations en 2020 – sachant que la France importe la quasi-intégralité de ses besoins depuis la fermeture du gisement de Lacq (Pyrénées-Atlantiques), en 2013.
Selon la filière, ce n’est qu’un début, et le biométhane pourrait même atteindre des pourcentages supérieurs dans le temps imparti. D’après une étude publiée dès 2013 par l’Agence de la transition écologique, la France disposerait d’assez de substrats pour permettre la production de 56 TWh en 2030 (résidus de culture et déjections d’élevages), et de 131 TWh en 2050 (avec des cultures intermédiaires pour cela).
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