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Vue sur le devant de la cabine du camion de Sandra Walter, entre Lillo (Belgique) et Beaune (France), le 12 mai 2022.
GUILLAUME BLOT POUR « LE MONDE »

Dans la cabine des routières : « On est toutes piquées au gasoil ! On aime les bruits de piston, on aime nos camions, on fait équipe ensemble »

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Publié le 28 mai 2022 à 04h46, modifié le 28 juin 2022 à 12h06

Temps de Lecture 13 min. Read in English

Le jour se lève sur le port d’Anvers. Il est 6 h 47, aux abords de Lillo, petit village de charme flamand, noyé dans un océan d’usines. Ici, pas de marins qui dansent, mais une mélodie de fond : celle des moteurs de poids lourds. Installés en bord de voie pour passer la nuit, ils s’apprêtent à repartir. Huguette Durand et Sandra Walter, 66 et 51 ans, ont dormi dans leur cabine. Les citernes ont été chargées la veille, et les deux femmes sont prêtes à quitter le quai pour rejoindre le sud de Lyon, où la cargaison doit être livrée, à environ 800 kilomètres de là. Les deux « vieilles routières », comme elles aiment se présenter, sont missionnées par l’entreprise Durand-Lémi, dont Huguette est aussi la patronne. Elles ont chacune leur véhicule sur ce convoi et nous accueillent à tour de rôle pour une journée en leur compagnie. Selon la réglementation, elles sont autorisées à rouler dix heures quotidiennes. On ne sait pas encore jusqu’où le voyage nous mènera au terme de ces deux jours, le trafic en décidera pour nous. Mais, avant de prendre la route, on s’arrête, au routier du coin, prendre un café.

Entre un croissant, un paquet de Chesterfield et des cafés fumants, Sandra et Huguette racontent leur passion pour les poids lourds. Leur récit n’est pas sans évoquer celui d’autres routières, contactées en amont par téléphone : Séverine Bru, Eliane, Jessica ont elles aussi témoigné de la vie en camion quand on est une femme.

Huguette Durand et Sandra Walter, patronne et salariée, en tant que routières, des Transports Durand-Lémi, sur un parking d’autoroute, entre Lillo (Belgique) et Beaune (Côte-d’Or, France), le 12 mai 2022.

Toutes préfèrent ne pas être appelées « conductrices ». Elles ne se contentent pas de conduire un poids lourd, elles ont épousé un mode de vie. « On est toutes piquées au gasoil ! On aime les bruits de piston, on aime nos camions, on fait équipe ensemble », s’exclame Huguette. La patronne des transports Durand-Lémi, au volant de mastodontes depuis 1978, est l’une des pionnières de la région grenobloise. Elle est une porteuse d’histoire, une militante pour les femmes sur la route, mais aussi un véritable générateur de punchlines. « Objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ? », sourit la doyenne, citant Lamartine pour illustrer son amour de la machine.

Talons et W-C qui débordent

Elle nous invite à monter dans son tracteur, la cellule de conduite qui tire la remorque, pour prendre la route. Attention, si l’on veut circuler derrière les sièges, dans la cabine : ce sera sans les chaussures. L’endroit doit rester impeccable. Elle lance le moteur, retire ses lunettes de vue à la monture ornée de brillants pour enfiler une paire de solaires. Huguette porte un foulard élégamment noué autour du cou, une veste rouge cintrée et manie les pédales en chaussures à talons. Il est 7 h 45, direction la France.

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