Dans le bâtiment, des formations sur mesure pour les femmes

La féminisation du monde du BTP a de beaux jours devant elle. Désormais, des cursus spécifiques sensibilisent, forment et insèrent celles qui le désirent.

Le secteur du BTP accueille en son sein de plus en plus de femmes. Mais elles ne représentent, en 2022, que 13 % des postes du bâtiment selon le principal syndicat du secteur. Kali9
Le secteur du BTP accueille en son sein de plus en plus de femmes. Mais elles ne représentent, en 2022, que 13 % des postes du bâtiment selon le principal syndicat du secteur. Kali9

    L’heure est venue pour celles qui veulent devenir conductrices de travaux ou charpentières de tenter leur chance. La pénurie de main-d’œuvre dans les métiers du bâtiment donne une occasion de plus aux acteurs de l’emploi d’y accélérer la féminisation.

    L’association We Are All Builders (WAAB) relève le défi de préparer ces femmes aux métiers du BTP. L’organisme d’insertion parisien offre trois sessions de formation de juin à décembre 2022. Au programme : cours théoriques, apprentissages de la sécurité sur un chantier, formation technique et stage en entreprise. « L’embauche est garantie dès le début du parcours, les apprenties n’avancent pas à l’aveugle », affirme Adèle Jamaux, présidente de WAAB. À la clé, un contrat de travail de six mois minimum.



    Une fois formées, comment sont accueillies ces femmes dans le milieu du bâtiment ? Pour la présidente, il faut veiller à ce que leur arrivée se passe pour le mieux. « Il y a parfois une culture virile sur les chantiers, qui peut créer des réticences à faire entrer une femme dans l’équipe : Va-t-elle causer des problèmes ? Va-t-elle pouvoir porter des charges assez lourdes ? Il faut former à accueillir la mixité dans les effectifs. » Pour ce faire, elle préconise des dispositions concrètes : placer les femmes en équipe plutôt que seules lors de l’embauche ou les former exclusivement entre elles pour favoriser la solidarité.

    Des réticences très vite effacées

    Le choix du 100 % féminin, l’association Du Côté des Femmes l’a fait. Avec ses chantiers d’insertion « les Embellisseuses d’avenir », les rescapées de violences conjugales y trouvent une occasion de se reconstruire dans un métier « traditionnellement masculin ». Marianne Baraka, responsable du projet, reconnaît que le BTP peut faire peur. « Quand on parle du bâtiment, on pense aux travaux très physiques. Mais nos filles font tout toutes seules, elles transportent les charges et montent les échafaudages », assure la responsable. « La réalité, c’est qu’on ne s’abîme plus autant qu’avant dans le BTP. C’est sécurisé et les aides mécaniques atténuent la pénibilité du travail », confirme-t-elle.

    Les inquiétudes des recruteurs sont vite contrecarrées. « C’est la preuve par l’exemple. À chaque chantier, ils sont surpris par la résistance des femmes à l’effort, la méticulosité. Récemment, un client particulièrement sceptique a fini par chanter nos louanges sur LinkedIn : Elles en jettent, vous pouvez y aller les yeux fermés, s’amuse la responsable du projet.

    « La féminisation n’est pas un objectif, mais une réalité »

    Pour mettre à mal les préjugés, les événements contribuent à l’opération séduction. Comme les rallyes urbains du BTP, organisés par les Sensation’Elles. L’objectif ? « Réunir femmes dirigeantes, cheffes d’entreprises et actrices du BTP pour montrer qu’elles n’ont peur de rien », souligne Mathieu Wanner, le créateur de l’événement. Féminiser leurs équipes, les entreprises ne peuvent plus y échapper.

    Avec la loi Rixain, elles doivent embaucher au moins 30 % de femmes à des postes à responsabilité à l’horizon 2026. Le fondateur affirme ne pas vouloir que « les entreprises recrutent des femmes seulement pour répondre à une formule mathématique », mais plutôt qu’on leur donne les clés pour réussir par elles-mêmes. Selon lui, il faut garder en tête que « la féminisation du métier n’est pas un objectif, mais bien une réalité ».



    Mais le chemin à parcourir reste encore long. En 2022, les femmes ne représentent que 13 % des postes du bâtiment selon la Capeb, le principal syndicat du secteur. « Il faut continuer à mettre en contact celles en recherche d’emploi et les entreprises qui peinent à recruter », revendique Julie Lefebvre, la vice-présidente d’Est Ensemble, un établissement public territorial du Grand Paris. L’organisme offre, en collaboration avec d’autres acteurs de l’emploi comme We Are All Builders, des opportunités de formation et d’insertion pour les habitantes de neuf communes de Seine-Saint-Denis. De quoi donner des solutions concrètes à toutes celles qui hésitent encore à se lancer dans le BTP.