Les photographes ont-ils été les grands oubliés lors de la pandémie de Covid-19 ? La frilosité des pouvoirs publics à leur égard prend un reflet tout particulier depuis l’ouverture, lundi 4 juillet, des Rencontres de la photographie d’Arles, qui se tiennent jusqu’au 25 septembre. C’est avec une rare discrétion que la nouvelle ministre de la culture, Rima Abdul Malak, a fait sienne une petite partie des mesures préconisées (treize sur trente-un) dans le rapport très attendu de la conseillère d’Etat Laurence Franceschini sur le financement de la production et de la diffusion d’œuvres photographiques, publié le 17 mars.
Avant le troisième Parlement de la photographie, organisé les 7 et 8 juin, au Palais de Tokyo, à Paris, cette annonce avait été uniquement mise en ligne sur le site Internet de la Rue de Valois. Sans le moindre effet de manches. Pourtant, la ministre s’engage, d’ici à la fin 2022, à améliorer le respect du droit d’auteur des photographes, à renforcer la visibilité de la création photographique – notamment des femmes –, à développer le soutien aux différents acteurs de cette filière, à mieux protéger le patrimoine photographique et à développer le soutien à l’éducation à l’image.
Pour aider ce secteur affaibli par la crise sanitaire, ces objectifs vont dans le bon sens, mais nécessitent une volonté politique forte pour ne pas rester vœu pieux, selon l’Union des photographes professionnels (UPP) et la Société des auteurs des arts visuels et de l’image fixe (SAIF). Dans la plupart des réformes promises, le cadre légal existe de longue date, mais n’est tout simplement pas appliqué. « Il faut revitaliser les outils pour leur donner leur pleine efficience », concède d’ailleurs Mme Franceschini.
« Phénomène de précarisation »
La crise sanitaire a joué un rôle de catalyseur de tendances de fond. Le besoin accru de contenus visuels dans le numérique s’accompagne d’une inclination à la réduction des coûts et au développement d’un marché à très bas prix des banques d’images. Selon une note de conjoncture du ministère de la culture, le chiffre d’affaires des photographes a chuté de 23 % au cours de l’année 2020. Au premier trimestre 2021, les recettes demeuraient inférieures de 21 % par rapport à la même période de 2019. Les photographes indépendants ont payé un lourd tribut, la moitié ayant perdu 50 % ou plus de leur chiffre d’affaires.
Cet écosystème englobe des métiers hétéroclites. Publiée en juin par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), une étude socio-économique du marché de la photographie professionnelle en France répertorie quatre segments. Tout d’abord, la photographie artistique ou de création, qui est précisément exposée sur les cimaises arlésiennes, à laquelle s’ajoutent celle d’illustration (banques d’images, microstocks et clichés utilisés en communication d’entreprise, publicité, édition ou commerce en ligne), puis celle d’information – publiée dans les journaux – et enfin la photographie sociale (scolaire, d’identité, d’événements, comme mariage, naissance…).
Il vous reste 70.29% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.