Les femmes se sentent davantage discriminées que les hommes, et ce sentiment ne cesse d’augmenter depuis dix ans. Désormais, il est principalement porté par le motif sexiste, devant les causes liées à l’origine, la nationalité ou la couleur de peau. Même si ces dernières demeurent prégnantes.
Pour les hommes, le risque de déclarer une discrimination reste quatre à six fois plus élevé pour les immigrés ou descendants d’origine subsaharienne et les descendants de natifs d’outre-mer par rapport aux personnes sans ascendance migratoire. C’est ce que révèle l’un des trois volets de l’enquête Trajectoires et origines, publiée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) mardi 5 juillet, consacrée au « sentiment de discrimination ».
Un peu plus de dix ans après la première édition (2008-2009), l’Insee revient avec des données collectées entre 2019 et 2020, une stratégie d’échantillonnage similaire – 27 200 personnes interrogées vivant en logement ordinaire en France métropolitaine – et une question centrale : « Au cours des cinq dernières années, pensez-vous avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations ? » L’étude, coproduite avec l’Institut national d’études démographiques (INED), montre que 19 % des 18-49 ans répondent oui. Ils étaient 14 % en 2008-2009.
Cette hausse s’explique par « une sensibilité plus forte aujourd’hui aux discriminations », a souligné Sylvie Le Minez, de l’Insee, lors d’une conférence de presse, mais également par « une augmentation dans la population des profils rapportant le plus de discriminations ». Exemple : parmi les hommes de 18 à 49 ans, la proportion d’immigrés et de descendants originaires du Maghreb et d’Afrique subsaharienne est passée de 10 % à 14 %.
21 % des femmes interrogées disent avoir été victimes de discriminations – 46 % pensent l’avoir été en raison de leur sexe, contre 28 % en 2008-2009 –, et 16 % des hommes. Il y a dix ans, ces proportions étaient presque égales, 14 % contre 13 %. Pour les hommes, l’origine, la nationalité ou la couleur de peau restent les principaux motifs de discrimination ressentie : dans 58 % des cas (c’était 65 % il y a une décennie), contre 32 % pour les femmes.
2 % des victimes portent plainte
Si ces causes ont baissé parmi les immigrés et les descendants originaires du Maghreb et d’Afrique subsaharienne (même si ces groupes restent de loin les plus exposés), c’est qu’il existe un report vers les déclarations pour motif religieux, note l’enquête. 11 % des personnes se déclarant de confession musulmane rapportent des discriminations religieuses, contre 5 % en 2008-2009. « Ce phénomène de substitution témoigne de la prégnance du débat sur l’islam dans la société française aujourd’hui », a commenté Patrick Simon, de l’INED.
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