Annoncée en octobre dernier, l’aide de 200 € allouée aux jeunes pour passer la formation Bafa en 2022 n’aura pas suffi. Les colonies de vacances et les centres de loisirs pâtissent toujours d’une pénurie d’animateurs diplômés pour la saison estivale.

En cause, les faibles rémunérations et les temps de travail à rallonge. Avec un revenu minimum obligatoire de 23,87 € brut par jour pour une sollicitation du matin jusqu’à parfois tard le soir, difficile de rendre le métier attractif. « Ça fait dix ans que les formations Bafa voient leurs effectifs diminuer », rappelle Benoît Fontaine, directeur du service vacances et séjours éducatifs à la Ligue de l’enseignement.

Une chute du nombre de diplômés du Bafa

En 2019, 43 000 diplômes avaient été délivrés, contre 54 000 en 2011, d’après l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep). Le Covid n’a rien arrangé, avec une chute supplémentaire de 12 000 diplômés du Bafa entre 2019 et 2020. Résultat, des séjours en colonie de vacances ont été annulés et « des centres de loisirs fermés tout l’été faute d’une capacité d’accueil suffisante », déplore Delphine Labails, présidente de la commission éducation à l’Association des maires de France et maire PS de Périgueux (Dordogne).

Dans l’urgence, des établissements trouvent pourtant des solutions. À Logelbach, dans le Haut-Rhin, le directeur du centre de loisirs va faire appel à des CD2I (contrat de travail intermittent) pour que des animateurs, habituellement en congé, puissent être présents cet été. Un complément de salaire plébiscité, selon lui : « Avec des contrats de 10 heures par semaine sur l’année, avoir trois ou quatre semaines supplémentaires à 48 heures, ça peut aider », relève Yannick Boehm.

Certains animateurs rempilent aussi par solidarité : « Ça s’est très bien passé toute l’année, donc certains viennent pour soutenir les équipes. » Une stratégie qui lui permet de combler les effectifs et d’« ouvrir dans des conditions optimales ».

Des vacances annulées pour 400 enfants

Les collectivités, gestionnaires des centres de loisirs, peuvent aussi jouer sur les quotas imposés pour pallier les manques d’animateurs. Au moins 50 % d’entre eux doivent être diplômés. Les autres peuvent être soit des non-diplômés expérimentés, comme les éducateurs sportifs, à hauteur de 20 %, soit des stagiaires du Bafa, jusqu’à 50 % maximum. « Nous finançons leurs formations, et ils peuvent venir en stage au sein de nos établissements », explique l’élue de Périgueux, Delphine Labails.

Du côté des colonies de vacances, 400 enfants sur 17 000 sont concernés par les annulations de séjours au sein de la Ligue de l’enseignement. Un taux « maîtrisé », juge Benoît Fontaine, qui propose des solutions alternatives : « Les enfants peuvent se reporter sur des séjours où il reste des places. Parfois, ça ne correspond pas à leurs attentes, d’ailleurs certains refusent, mais au moins on propose une solution. »

L’organisme PEP Alsace, quant à lui, a réussi à maintenir tous les séjours. « Nous travaillons avec des professionnels permanents », justifie Philippe Hertzog, responsable du service commercial et de la communication, qui a davantage de difficultés avec les animateurs saisonniers qui complètent l’équipe.

« On sent un besoin de participer à la conception du séjour »

En plus de la fidélisation d’une année à l’autre, « mise en place bien avant la pénurie », l’organisme communique beaucoup sur les réseaux sociaux pour les postes vacants. « Nous puisons dans le vivier de nos animateurs périscolaires pendant l’année, à la fois pour relayer les informations et susciter des vocations pour l’été », détaille le responsable.

À long terme, cet été en tension pousse néanmoins le secteur à la réflexion. Comme dans d’autres milieux bouleversés par la crise sanitaire, la nécessité de revaloriser la profession s’impose. Ce sera l’un des sujets principaux, en septembre, du comité de filière de l’animation, annoncé aux assises de l’animation en février.

Au-delà de cette revalorisation, il existe aussi une « crise de l’engagement » dans ces métiers, relève Philippe Hertzog. D’où l’importance de repenser en profondeur le modèle des colonies de vacances, plaide Benoît Fontaine, pour la Ligue de l’enseignement : « On sent chez les animateurs un besoin de participer à la conception même des séjours. Les jeunes ont des préoccupations liées à la citoyenneté, à la transition écologique, surtout depuis le Covid. Plus d’horizontalité et de collaboration avec eux rendrait le milieu plus attractif. On y travaille. »

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Moins de séjours qu’avant le Covid

Avec 30 000 séjours et 821 000 départs de mineurs au cours de l’été 2021, l’activité des accueils collectifs de mineurs avec hébergement (colonies de vacances, séjours…) est restée inférieure de l’ordre de 25 % à celle de l’été 2019, d’après l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep).

Dans les accueils collectifs de mineurs sans hébergement (centres de loisirs, centres aérés…), 1,15 million de places ont été déclarées en juillet 2021, contre 990 000 en juillet 2020. Un chiffre qui reste cependant inférieur de 65 000 par rapport à juillet 2019.