Le bel été des coopératives jeunesse de services

Morcenx-la-Nouvelle (Landes)

De notre correspondant

L’ancienne Bourse du travail mise à disposition par la mairie de Morcenx accueille tous les matins de l’été une quinzaine de jeunes coopérateurs, âgés de 16 à 18 ans. « Pendant huit semaines, ils ont été d’accord pour se lever parfois très tôt, car tous n’habitent pas en centre-ville, et pour travailler au service d’entreprises et de particuliers », constate Aurélie Lagarde, leur animatrice.

Au programme de leur journée, une réunion d’équipe, puis chacun part à son travail, qui pour être ambassadeur du tri à l’écomusée de Marquèze, qui pour repeindre les murs d’une école, tondre la pelouse d’une personne âgée ou animer une buvette. Vers 17 heures, les jeunes font le bilan de la journée avec les animateurs et rentrent les factures.

Tous ces jeunes ont trouvé un emploi saisonnier dans le cadre d’une coopérative jeunesse de services (CJS), une entreprise éphémère qui ne dure que le temps d’un été. Il s’en crée une cinquantaine tous les étés en France. Nées au Québec il y a trente ans, arrivées en France il y a dix ans, les CJS ont comme objectifs de sensibiliser les jeunes à l’entrepreneuriat collectif et de dynamiser des quartiers populaires.

À Morcenx, les jeunes ont pu tester leur capacité à se prendre en main. « Pour toutes les missions que nous remplissons, nous avons démarché des clients, établi les devis et fait le suivi sur notre tableau de bord. Ce que nous gagnons est mis dans un pot commun », explique Mélanie Caussarieu, lycéenne pendant l’année et coopératrice cet été.

Comme elle, Marius Parrain, 16 ans, était à la recherche d’un job d’été. Pour échapper à la castration du maïs dans les champs, qui est souvent le passage obligé pour les jeunes Landais l’été, il a postulé à la coopérative en création : « Dès le premier jour, on signe notre contrat avec la coopérative d’activités et d’emploi Co-actions, c’est impressionnant. »

Chaque CJS est abritée par une coopérative ou une association adulte afin de bénéficier de son immatriculation juridique. Les jeunes signent avec leur coopérative un contrat spécifique. Celle-ci édite les factures et à la clôture, imminente, de la CJS, elle reversera le chiffre d’affaires en salaires aux jeunes. Selon les CJS, ils peuvent espérer une rémunération qui va de 400 à 1 000 €.

Les CJS ont quelques bonnes fées autour d’elles. Elles sont rassemblées dans un comité local, comprenant des services jeunesse, des collectivités, des partenaires économiques. Avec comme cheville ouvrière, à Morcenx, l’association Ploucs, chargée de l’animation et aussi du transport des adolescents sur leurs lieux de travail, une problématique cruciale dans ce vaste département rural. Depuis trois ans, Ploucs anime une CJS dans différents bourgs, pour un coût global de 50 000 €.

Cette année des jeunes de Sabres et Morcenx sont concernés. Une particularité qui explique le nom de leur CJS : Sabenx. « Comme dans toute coopérative, nous avons pris des parts sociales à 2 euros et nous avons élu des co-présidents, détaille Mélanie. Chacun des coopérateurs est dans un comité (finances, commercial, communication). On fonctionne comme une entreprise. C’est intéressant pour notre notre CV ! »

Cet après-midi d’août, Mélanie et Marius ont pour mission de sensibiliser au tri sélectif les visiteurs de l’écomusée de Marquèze, un site qui reconstitue la vie des Landais au XIXe siècle. Ils se postent à proximité des poubelles. « Ils sont un peu timides au début, s’amuse Denis Richard, le directeur. Pour les aider on les forme une journée. C’est la deuxième année que nous avons un contrat avec une CJS. C’est aussi important pour nous d’impliquer des jeunes du territoire, qui viendront peut-être travailler chez nous par la suite. » L’écomusée emploie 25 salariés et plus de 60 en saison.

Dans une région rurale comme les Landes ou dans les quartiers urbains, la CJS fonctionne aussi comme sas d’insertion vers le milieu professionnel. « Dans chaque CJS, les animateurs parlent aux jeunes des débouchés dans l’économie sociale et solidaire, souligne Régis Tirlemont, président de la Fabrique coopérative, qui labellise les CJS. Par la suite, on sait que certains jeunes se lancent dans la création de leur activité, s’impliquent dans la vie associative locale ou deviennent nos prochains animateurs de CJS ! »