C’est l’une des surprises de l’été : un discret arrêté ministériel, publié le 1er août et signé par Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur, annonce la création, au sein de l’université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (UPEC), d’un institut d’études politiques (IEP). Un nouveau Sciences Po est né, le onzième depuis la création de l’Ecole libre des sciences politiques, à Paris, en 1871. Cet institut grandira sur les bases de l’école internationale d’études politiques, une unité de formation et de recherche créée en 2019 par l’UPEC, et dont les locaux sont situés à Fontainebleau (Seine-et-Marne).
Si l’existence du nouvel institut sera officielle à compter du jeudi 1er septembre 2022, la première rentrée est programmée pour septembre 2023, avec une petite cohorte de soixante-quinze étudiants de première année.
La création de ce nouvel IEP, qui s’ajoute aux dix existants (Paris, Strasbourg, Aix-en-Provence, Lille, Lyon, Rennes, Toulouse, Saint-Germain-en-Laye ainsi que Bordeaux et Grenoble) est une réponse à l’engouement des jeunes pour ces formations interdisciplinaires, devenues très sélectives et suscitant de grosses déceptions chez les recalés. En 2022, plus de 10 000 jeunes se sont présentés au concours commun mis en place par un réseau de sept Sciences Po, pour seulement 1 140 places. Sept ans plus tôt, en 2015, ils étaient 8 868 lycéens à tenter d’intégrer l’un des instituts. L’attractivité de la filière progresse chaque année. « Nous ne sommes pas un concurrent pour les autres IEP au vu du nombre de candidatures et du peu de places », souligne Yves Palau, directeur de Sciences Po Fontainebleau.
Ouverture polémique
La création de ce nouvel IEP ne fait pourtant pas l’unanimité. En mai 2022, le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser), une instance consultative, a émis un avis défavorable sur le projet de création de « Sciences Po Fontainebleau ». Le ministère est passé outre.
« On va déshabiller Pierre pour habiller Paul. Des enseignants-chercheurs et du personnel administratif de l’UPEC seront dirigés vers l’IEP, au détriment de l’université » – Pierre Chantelot, représentant du Snesup-Fsu
Pierre Chantelot, représentant du Snesup-Fsu, a voté contre cette création. Le syndicat dénonce le fait que la formation sera payante pour la majorité de ses étudiants et redoute une forme de « privatisation » de l’université. De plus, l’enseignant questionne le manque de moyens humains annoncés pour créer l’établissement : « On va déshabiller Pierre pour habiller Paul. Des enseignants-chercheurs et du personnel administratif de l’UPEC seront dirigés vers l’IEP, au détriment de l’université. Alors qu’il existe déjà un UFR de sciences politique à UPEC, on crée un établissement qui va surfer sur le prestige du nom IEP pour être plus sélectif, avec un autre modèle économique pour le sortir de l’université publique et ouverte à tous. » La question des frais d’inscriptions de ce nouvel institut a également refroidi le syndicat étudiant la Fage.
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