Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Atsem en grève : « Nous sommes les invisibles, mais sans nous il n’y a pas d’école maternelle »

Les agentes spécialisées des écoles maternelles étaient en grève, lundi 5 septembre, pour obtenir une revalorisation de leur salaire à la hauteur de l’accroissement de leurs responsabilités techniques et éducatives.

Par 

Publié le 05 septembre 2022 à 20h39, modifié le 06 septembre 2022 à 07h14

Temps de Lecture 3 min.

« Barbecue revendicatif » à Allonnes (Sarthe), rassemblements plus classiques devant de nombreuses mairies du pays… Quelque 50 000 agentes territoriales spécialisées des écoles maternelles (Atsem) étaient appelées à faire grève, lundi 5 septembre, par les syndicats CGT-fonction publique et UNSA-territoriaux. Profession composée à 99 % de femmes selon la CGT, les Atsem demandent à toucher la prime de 183 euros mensuels que le Ségur de la santé a octroyée aux puéricultrices, aides-soignants et aides à domicile. Fonctionnaires territoriales de catégorie C, elles demandent en outre à intégrer la catégorie B de la fonction publique et souhaitent que soit pleinement reconnue la pénibilité de leurs fonctions.

Cette liste de doléances est à la hauteur du manque de reconnaissance dont souffre depuis des années la profession, soutient Delphine Depay, référente fédérale de la CGT pour les Atsem. A ses yeux, « les salaires sont extrêmement faibles, pas à la hauteur des missions et des qualifications ». Conditionnée à l’obtention d’un CAP « petite enfance » et à la réussite au concours, une carrière d’Atsem débute au smic et s’achève aux alentours de 1 700 euros net, pour une quarantaine d’heures de travail par semaine.

« Macron disait qu’on était indispensables »

« On est les grandes oubliées du Ségur, or Macron disait qu’on était indispensables », regrette Sylvia Sowa-Vérot, 40 ans, qui exerce le métier depuis 2003 à Saint-Etienne. Nous sommes les invisibles, mais sans Atsem, il n’y a pas d’école maternelle. » Dans la journée de l’agente spécialisée, il y a d’abord la préparation matérielle de la classe, l’accueil des parents et des enfants, puis l’organisation d’ateliers pédagogiques. Viennent ensuite l’accompagnement à la cantine, l’organisation de la sieste et du réveil, le départ des enfants et enfin le nettoyage de la classe. Il faut aussi accompagner les plus petits aux toilettes et leur enseigner la propreté.

« Beaucoup, à la quarantaine, sont mises à la retraite d’office pour invalidité, avec des traitements faibles », Delphine Depay, référente CGT

Il y a aussi, chaque mois de juillet, la tâche redoutée consistant à briquer l’école de fond en comble, impliquant de vider les classes de tous leurs meubles, de cirer les sols, de laver les jeux un par un. « Ce mois-là est épuisant, confie Mélodie (elle ne souhaite pas donner son nom de famille), 43 ans, Atsem dans l’Aisne depuis 2009. On met une bonne semaine à s’en remettre. »

Parmi les sources de pénibilité physique, les Atsem évoquent le fait de porter les enfants et les postures à proximité du sol qui causent des douleurs au dos, le bruit permanent, ou encore les activités manuelles qui provoquent des troubles musculo-squelettiques. « Beaucoup, à la quarantaine, sont mises à la retraite d’office pour invalidité, avec des traitements faibles », assure Mme Depay, pour qui la reconnaissance de pénibilité devrait ouvrir droit à « un départ à la retraite anticipé sans décote ».

Un rôle éducatif en souffrance

Le besoin de reconnaissance est d’autant plus vivace que les missions des Atsem se sont étendues depuis la lointaine époque des « dames de service ». A partir de 2014, des communes leur ont confié la gestion des « nouvelles activités périscolaires », pour éviter d’embaucher des animateurs. Puis en 2018, un décret les a fait « appartenir » à la communauté éducative, à laquelle elles ne faisaient jusqu’alors que « participer ».

Aux yeux de Gaëlle Lenôtre, 52 ans, Atsem pendant vingt ans à Six-Fours-les-Plages (Var), c’est justement ce rôle éducatif qui ne peut être mis en œuvre, compte tenu de l’organisation actuelle : « A partir du moment où l’enseignant et son Atsem n’ont pas le même employeur [éducation nationale pour l’un, commune pour l’autre], il n’y a aucun temps pour travailler ensemble. » Elle cite des réunions pédagogiques organisées pendant la pause de midi, quand les Atsem sont occupées à la cantine.

« On voudrait être intégrées à la communauté éducative, comme notre statut le prévoit, mais dans les faits on ne peut pas », Gaëlle Lenôtre, 52 ans, Atsem

« On voudrait être intégrées à la communauté éducative, comme notre statut le prévoit, mais dans les faits on ne peut pas », déplore-t-elle. En revanche, « pendant le Covid, on était réquisitionnées pour aller faire la désinfection dans les maisons de retraite… »

Delphine Depay assure que la CGT a demandé deux fois au ministère de la transformation et de la fonction publiques, fin juin et début août, l’ouverture de négociations, sans réponse à ce jour. Au cabinet du ministre, Stanislas Guerini, on dit suivre « avec attention » la mobilisation, tout en renvoyant les discussions au cadre plus général du « chantier des carrières et des rémunérations, qui sera lancé prochainement pour tous les métiers de la fonction publique ».

« Nerveusement, on est à bout », alerte en attendant Mélodie, dans l’Aisne. Du fait des pesanteurs du métier, « énormément de collègues songent à se reconvertir ; moi, je ne suis pas encore assez dégoûtée ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Quel monde d’après pour le périscolaire ? »
L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Contribuer

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.