C’est une note des services statistiques du ministère de l’éducation nationale, parue pourtant au cœur de l’été, qui ne cesse d’alimenter les débats dans les cercles éducatifs, tant les chiffres y sont éloquents. Si l’enseignement privé sous contrat accueille environ un élève sur cinq en France depuis plusieurs décennies, l’entre-soi s’y est davantage renforcé que dans le public, indique cette étude, alors que le ministre, Pap Ndiaye, a fait de la mixité sociale l’une de ses priorités. A la rentrée 2021, 40 % des élèves scolarisés dans un collège privé sous contrat étaient issus d’un milieu social très favorisé, contre à peine 20 % dans le public.
Inversement, 18 % des collégiens du secteur privé sous contrat faisaient partie de classes sociales défavorisées, contre 42 % des élèves du secteur public. Des écarts qui n’ont fait que croître, alors que la ségrégation parmi les collèges publics suit une tendance légèrement à la baisse depuis 2018. En 1989, la proportion d’élèves de milieu social très favorisé était déjà supérieure de 11 points en classe de 6e dans les collèges privés par rapport au public. Elle grimpe aujourd’hui à plus de 20 points, avec une accélération depuis les années 2010. Le collège concentre les enjeux de mixité sociale, il est vrai. A l’école élémentaire, les familles font le choix de la proximité.
Au lycée, l’orientation entre filière générale, technologique et professionnelle provoque un tri social, les classes défavorisées étant plus représentées dans les deux dernières voies. Au-delà des chiffres nationaux, c’est à l’échelle locale que tout se joue, tant lieu de résidence et milieu social sont liés. Historiquement, les collèges et lycées privés se sont davantage implantés dans les centres-villes, volontiers plus bourgeois. Aujourd’hui, si un dixième des collèges privés scolarisent moins de 6 % d’élèves de milieu défavorisé, un dixième en accueille au moins 39 %, note l’étude du ministère de l’éducation nationale.
De fait, les écarts de composition sociale entre le privé et le public atteignent leur paroxysme en Ile-de-France, dans le Sud méditerranéen et les départements et régions d’outre-mer. Le cas de Paris est, à ce titre, exemplaire. Dans la capitale, 37 % des collégiens sont scolarisés dans l’enseignement privé sous contrat, qui compte 3 % d’élèves défavorisés dans ses effectifs, selon les calculs de l’économiste de l’éducation Julien Grenet. Selon une étude qu’il a conduite en 2017, la « ségrégation sociale » dans les collèges de la capitale est due pour moitié à la typologie du quartier de résidence lui-même, et pour l’autre moitié à la part des élèves inscrits dans l’enseignement privé, une faible part (5 %) relevant d’inscriptions dans un collège public hors secteur.
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