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Le gouvernement joue l'apaisement avec le secteur pharmaceutique

Les entreprises du médicament, opposées au projet de référencer les médicaments par des appels d'offres qui ouvriraient la porte aux acteurs non européens à bas coût, ont été entendues. Le ministre de l'Industrie a annoncé une série de concessions dont la suppression de ce type d'appels d'offres qui ne sera pas institutionnalisé, même si une expérience sera menée en 2023.

Roland Lescure a annoncé une série de concessions sur les points hérissant les industriels - notamment, sur les ponctions financières croissantes, la décision de la Première ministre de lancer une mission interministérielle de remise à plat.
Roland Lescure a annoncé une série de concessions sur les points hérissant les industriels - notamment, sur les ponctions financières croissantes, la décision de la Première ministre de lancer une mission interministérielle de remise à plat. (Gumpanat/Shutterstock)

Par Myriam Chauvot

Publié le 6 oct. 2022 à 14:46Mis à jour le 6 oct. 2022 à 18:50

Le gouvernement fait des concessions pour rassurer le secteur pharmaceutique. En ouverture jeudi matin du colloque du « G5 », le rassemblement des plus grandes entreprises françaises de la santé, le ministre de l'Industrie, Roland Lescure, a annoncé en particulier une marche arrière sur un projet très controversé. Il s'agissait pour l'Assurance Maladie de référencer par appels d'offres réguliers quelques médicaments pour une classe thérapeutique donnée. Ce qui lui aurait permis de dérembourser les médicaments non retenus.

Cette nouvelle mesure, introduite par le projet de loi 2023 de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), vise à abaisser le prix des médicaments matures ayant des génériques. Le secteur avait immédiatement dénoncé une porte ouverte aux acteurs à bas coût non européens, Chinois et Indiens en tête, et la destruction de l'appareil de production français.

Craintes entendues

« Le gouvernement a entendu vos craintes que cette mesure raréfie l'offre », a assuré Roland Lescure. « Nous déposerons donc, dans le cadre du projet de loi pour le financement de la Sécurité sociale, un amendement gouvernemental pour transformer cette procédure en simple expérimentation. »

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Le PLFSS 2023 prévoit déjà que le référencement débute par une opération test au quatrième trimestre 2023, sur une classe thérapeutique où « de nombreux laboratoires (4 et plus) avec plus de 5 % de part de marché sont déjà présents et avec un montant remboursé important », expose le projet de loi en prenant l'exemple les médicaments anti-ulcères (287 millions de coûts pour l'Assurance Maladie) qui comptent plus de 8 acteurs sur le marché et où l'objectif de l'appel d'offres serait d'économiser 97 millions.

Cette expérience aura donc bien lieu, mais le texte du PLFSS gravant dans le marbre le référencement d'une manière plus générale disparaîtra. Le secteur souffle, tout en restant méfiant, jugeant que toute expérimentation, même isolée, peut faire ressurgir le sujet à l'avenir.

Contre-proposition

Roland Lescure s'est employé à rassurer, avec une série de concessions sur d'autres points du PLFSS hérissant les industriels. Dont les ponctions financières croissantes, et l'introduction d'un prélèvement spécifique sur les médicaments innovants ayant une forte croissance de leurs ventes.

Le gouvernement accepte la demande du G5 et du syndicat des entreprises du médicament (Leem) de supprimer cette contribution spécifique, pour la remplacer par une nouvelle formule de calcul des prélèvements actuels. La « clause de sauvegarde » - la dîme payée par les laboratoires quand les dépenses publiques de médicaments excèdent le budget - sera assise non plus seulement sur le montant du chiffre d'affaires des laboratoires mais, pour 30 %, sur sa croissance pour intégrer la percée des médicaments innovants.

Mission interministérielle

Cela ne règle toutefois pas le problème de l'envol depuis 2021 des prélèvements opérés sur le secteur pharmaceutique, particulièrement dur pour les génériqueurs, dont la rentabilité est plus faible. « Les montants estimés de la clause de sauvegarde payée par les entreprises du médicament sont d'environ 800 millions d'euros en 2022, 1,3 milliard en 2023 et 2,4 milliards en 2024. Ils sont considérés comme insupportables et même confiscatoires pour certaines entreprises », a rappelé le président du G5, Didier Véron.

Le gouvernement veut trouver un terrain d'entente. « La Première ministre souhaite lancer une mission interministérielle sur le sujet afin de tout remettre à plat, de disposer de propositions concrètes en vue du PLFSS, de manière à repenser notre modèle », a annoncé Roland Lescure. Les industriels seront associés à cette mission qui devrait être dirigée par des personnalités qualifiées.

Partager la croissance

Le ministre de la Santé, François Braun, qui a clôturé le colloque du G5, a toutefois tempéré les espoirs d'allégement de la clause de sauvegarde. Celle-ci « atteint des montants élevés depuis deux ans, mais ces montants sont aussi le reflet d'une croissance très importante du chiffre d'affaires de vos industries sur le marché français, qui culmine aujourd'hui autour de 6 % de croissance avant régulation », a souligné le ministre qui rappelle qu'« avant 2017, le secteur des médicaments connaissait un taux de croissance quasi-nul, voire négatif ».

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Les industriels ne partagent pas cette analyse. « L'enveloppe des dépenses publiques de santé remboursées a augmenté, mais en son sein, le montant alloué aux médicaments a stagné. Cela a ramené leur part dans les dépenses remboursées de 13,6 % à 11,6 % et nous allons vers les 10 % », s'est insurgé le président des laboratoires Servier, Olivier Loreau, membre du G5.

Tous dénoncent un prix des médicaments remboursés si bas en France que « quand un médicament est exporté à moins de 50 %, il est en risque. Ce qui sauve les produits, ce sont les exportations », a observé Eric Ducournau, directeur général du groupe Pierre Fabre. Dans ces conditions, malgré les nombreuses concessions du jour, les industriels restent en ordre de bataille. « Des amendements vont être déposés, la concertation débute, nous serons présents », a conclu Didier Véron.

Myriam Chauvot

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