Stages tutorés en milieu rural : deux fois plus d'étudiants en 2021-2022

Sur les 91 stagiaires, 45 étudiants ont un projet immédiat de travail en zone rurale pour une activité rurale ou mixte en CDD ou CDI.

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Maud LAFON

Formation

Le bilan des 91 stages tutorés en milieu rural réalisés en 2021-2022, soit deux fois plus que l'année précédente, met en évidence des pistes d'amélioration pour permettre, notamment, un plus large déploiement géographique. La moitié des étudiants concernés avaient déjà un projet d'activité immédiate en zone rurale à l'issue de leur stage.

Le rapport d'exécution final du dispositif de stages tutorés en milieu rural 2021-2022 a été publié par l'école vétérinaire de Toulouse (ENVT), qui coordonne ce projet pour les
4 ENV, le 4 octobre, suite à la réunion du comité de pilotage du 16 juin. C'était la sixième année de mise en oeuvre de ce dispositif accompagné financièrement par la Direction générale de l'alimentation et dont l'existence est due à l'implication forte des organisations professionnelles vétérinaires.

Un doublement de l'effectif étudiant souhaitant cette voie d'approfondissement a été constaté en 2021-2022 : 91 étudiants (25 garçons et 66 femmes) se sont engagés dans un stage tutoré (contre 43 en 2020-2021) avec la répartition suivante : 9 à l'école vétérinaire d'Alfort (ENVA), 33 à l'ENVT, 27 à VetAgro Sup et 22 à Oniris.

17 d'entre eux n'ont reçu aucune bourse, 42 étudiants ont reçu une bourse de 500 euros, 30 étudiants ont reçu une bourse de 1 000 euros, soit un montant total des bourses effective ment allouées aux étudiants de 51 000 euros sur un nombre de bourses prévisionnelles par défaut de 91 000 euros.

Moins de stages autour des ENV

« La distribution des étudiants tutorés s'est élargie depuis 2018 et se centre moins autour de la zone d'influence des ENV. Certaines zones géographiques restent malheureusement peu attractives (régions ex-Aquitaine, PACA, Centre et Grand-Est). Le bassin allaitant du centre de la France et la zone Pyrénées attirent toujours ainsi que le grand Ouest de la France. Parmi la centaine de structures d'accueil, 23 avaient déjà reçu des étudiants en stages tutorés l'année précédente et une dizaine de vétérinaires tuteurs ont renouvelé l'encadrement d'un stagiaire » , précise le rapport du comité de pilotage.

Il souligne que le suivi pédagogique des étudiants est systématiquement assuré dans chaque ENV par plusieurs enseignants de l'établissement (9 à une vingtaine par école).

« Des visites sur lieux de stages ont été réalisées mais avec le nombre croissant d'étudiants et de lieux de stage, ce contact en présentiel est plus difficile à assurer. Les contacts entre les tuteurs enseignants et tuteurs vétérinaires/étudiants se font davantage par téléphone, à l'initiative souvent des enseignants », ajoute le rapport.

87 stages terminés sur 91

Sur 91 stages programmés, 87 stages se sont déroulés comme prévu : « avec l'accord de la direction des enseignements de l'ENVT, un stage a été interrompu 4 semaines avant sa fin pour « des raisons médicales », un stage n'est pas encore totalement achevé (au 30/07/22) pour des raisons médicales graves. De même pour VetAgro Sup, une étudiante n'a pas terminé son tutorat à la suite de difficultés rencontrées avec sa structure. Une étudiante n'a pas encore terminé son tutorat du fait de problèmes de santé. Enfin, pour la deuxième fois, une étudiante a réalisé un parcours mixte : tutorat + master management et administration des entreprises ».

Les difficultés rencontrées et suggestions d'amélioration varient selon les établissements.

A l'ENVA, par exemple, il est « regretté le délai entre le montage du dossier de candidature avec les domiciles professionnels d'exercice dans l'année (début d'année civile) et la réponse faite aux étudiants (mois de février-mars), même si cela s'améliore par rapport aux années précédentes ».

Echanges bimensuels difficiles

A l'ENVT, « faire respecter les échanges bimensuels « de routine » par les tuteurs reste difficile » et « il serait peut-être intéressant de réserver les visites en présentiel vers les nouveaux tuteurs ».

A Oniris, « le point de difficulté a été la re-saisie des dossiers sur la base de données SphinxOnline Manager ». Certains tuteurs ont suggéré que la validation des structures pourrait être accordée pour 2 ans, un point également demandé à l'ENVA.

« Il reste toujours des interrogations quant aux référentiels d'activité et de compétences qui peuvent être vus comme des objectifs à atteindre alors qu'ils ne constituent que des guides des apprentissages possibles qu'il convient de hiérarchiser en cours d'année », ajoute le comité de pilotage dans son rapport en précisant avoir « constitué un groupe de travail avec les tuteurs afin d'alléger le référentiel ».

Visites compliquées à maintenir

A VetAgro Sup, suite à l'interruption du tutorat à la demande d'une étudiante qui éprouvait des difficultés avec sa structure d'accueil, des solutions ont été trouvées par le comité de pilotage pour faire en sorte que ces situations soient évaluées et que des décisions (concernant par exemple un futur tutorat au sein de la structure) soient adoptées. Une question se pose quant au maintien des visites au sein des structures vétérinaires eu égard à l'augmentation très forte du nombre d'étudiants en tutorat (27 étudiants parfois situés dans des zones très éloignées en 2022-2023).

Enfin, une proposition d'amélioration porte sur les grilles d'évaluation (révision des critères, dématérialisation).

Concernant les projets professionnels des 91 étudiants tutorés, bien que leurs réponses soient cette année difficiles à obtenir, « parmi les stagiaires, certaines formules pédagogiques choisies par les ENV (aménagement du tutorat avec d'autres voies) font que ceux-ci s'engagent réellement en exercice en milieu rural ».

CDD prédominants

Ainsi, sur les 91 stagiaires, 45 étudiants ont un projet immédiat de travail en zone rurale pour une activité rurale ou mixte en CDD ou CDI, dont 26 dans la structure d'accueil. Les CDD restent prédominants.

Neuf étudiants finissent leurs thèses d'exercice. Trois étudiantes ont finalement choisi de s'orienter vers l'exercice en petits animaux en CDD ou CDI, le tutorat les ayant convaincues de ne pas s'orienter vers l'exercice ne milieu rural. Deux étudiants s'engagent dans un internat en pathologie des ruminants. Un étudiant s'oriente vers un diplôme d'école (ENVT) en biologie médicale. Trois étudiants déclaraient à la date du 30 juillet ne pas avoir d'activité prévue au 1 er septembre ou vouloir faire des CDD exploratoires.

« Comme pour les autres voies d'approfondissement, la vision à moyen terme est plus délicate à analyser : l'échantillonnage se fait sur une faible population, un questionnaire basé sur des méthodes d'enquête robustes serait nécessaire et une étude sur l'employabilité des jeunes tutorés à 5 ou 10 ans serait intéressante pour bien mesurer l'impact de cette politique publique sur l'insertion professionnelle en milieu rural », précise le comité de pilotage.

103 étudiants engagés en 2022-2023

Pour l'année 2022-2023, 103 étudiants sont déjà engagés dans une A6 en stages et 107 structures ont été retenues sur 138 candidates. Un travail sur l'information des critères d'éligibilité au dispositif des stages tutorés est en cours à l'ENVT.

Enfin, concernant l'encadrement financier de ce dispositif, le comité de pilotage précise qu'« au total 535 995 euros ont engagés et dépensés pour le dispositif pour l'année universitaire 2020/2021 pour 91 stages programmés et 87 réellement terminés. Le soutien financier du dispositif est désormais un enjeu majeur de sa pérennité ».

« Le dispositif est en plein essor mais demande une mobilisation de moyens spécifiques qui justifie pleinement l'accompagnement financier. Une attention doit être portée au maintien des stages dans des zones de « petite rurale » souvent désertifiées : une articulation entre les dispositifs déployés par les décrets DDADUE et ceux des stages tutorés doit être trouvée et mieux communiquée aux futurs stagiaires. L'amélioration de l'évaluation de ces stages selon l'approche compétences mériterait un groupe de travail pédagogique inter-ENV. Enfin, en termes de mesure d'impact de cette politique publique, le reliquat financier pourrait être dédié au financement d'une étude épidémiologique et/ou sociologique porté par un master afin d'évaluer l'efficacité du dispositif et l'insertion professionnelle à 5 ou 10 ans en milieu rural » , conclut le rapport.

Gros Plan : Stages tutorés : une immersion précoce dans l'exercice mixte

Les stages tutorés vétérinaires permettent à une structure vétérinaire exerçant en milieu rural d'accueillir un étudiant de 5 e année pour un stage de longue durée (18 semaines).

Ce dispositif est ouvert aux étudiants de
5e année des quatre écoles nationales vétérinaires françaises (ENV).

L'objectif est de faciliter l'acquisition d'autonomie et de confiance avant le premier emploi en milieu rural. Les stages tutorés ont également pour but de « favoriser le maintien de vétérinaires en productions animales en milieu rural », précise la Direction générale de l'enseignement et de la recherche dans une note de service du 2 octobre 2017.

Ces stages ont en effet été mis en place en 2017 après trois ans d'expérimentation et sont depuis montés en puissance (25 étudiants en 2017, 91 l'an dernier, 103 cette année).

Coordination assurée par l'ENVT

La coordination et le suivi ont été confiés à l'école vétérinaire de Toulouse pour les quatre ENV.

Le comité de pilotage des stages tutorés fait régulièrement le point sur ce dispositif d'accompagnement des jeunes en vue d'une meilleure insertion dans le milieu rural conformément aux engagements pris dans le cadre de la feuille de route ministérielle « réseau de vétérinaires dans les territoires ruraux et les productions animales » , fin 2017, à Paris.

La formation combine des stages de longue durée en clientèle mixte ou rurale et des périodes d'apprentissage à l'école, l'étudiant bénéficiant d'un encadrement personnalisé.

Le bénéfice est partagé par tous les intervenants : les étudiants, qui découvrent l'exercice rural et préparent une insertion professionnelle précoce ; les vétérinaires qui favorisent l'implantation de jeunes vétérinaires dans l'entreprise et trouvent des successeurs ou remplaçants ; les éleveurs qui maintiennent leur accès aux soins vétérinaires en zone rurale. M.L.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1634

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