Pénurie de conducteurs de bus scolaires : les agents publics bientôt sollicités

Un projet de décret approuvé par le Conseil commun de la fonction publique et le Conseil national d'évaluation des normes prévoit que les agents publics pourront travailler comme conducteurs de bus scolaires dans une entreprise privée. Cette mesure vise à lutter contre l'actuelle pénurie de personnel qui touche les transports scolaires.

Le Conseil commun de la fonction publique (CCFP) a voté le 8 novembre en faveur d'un projet de décret visant à permettre aux agents publics de travailler comme conducteur de bus scolaire à titre accessoire auprès d’une entreprise privée. Après le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), le 3 novembre dernier, c'est le deuxième avis favorable pour ce texte présenté par le ministère de la Transformation et de la fonction publiques.

Cette mesure, qui doit revêtir un caractère expérimental d’une durée de trois ans, est poussée par la conjoncture et vise à faire face aux difficultés de recrutement de conducteurs de bus scolaires des collectivités locales, particulièrement en zone rurale.

La sonnette d'alarme avait notamment été tirée au mois de juillet dernier par la sénatrice de Meurthe-et-Moselle Véronique Guillotin. Interpelant le ministre du Travail, Olivier Dussopt, elle avait déclaré : "Selon les transporteurs, il manquerait 8.000 conducteurs pour les ramassages scolaires, ce qui affecterait potentiellement 400.000 élèves et familles, et ce dès le mois de septembre."

Le sujet avait enflé. Fin août, le ministre de l'Éducation nationale, Pap Ndiaye, avait fait de la question des transports scolaires un sujet de préoccupation majeur de sa conférence de presse de rentrée en reconnaissant que la France était confrontée "à un déficit de chauffeurs" et que "cette crise [était] plus aiguë cette année".

La sécurité dans le collimateur des syndicats

Le texte examiné par le CCFP ouvre la possibilité pour les agents publics ne relevant pas d’un régime de cumul d’activités par déclaration auprès de leur employeur public de cumuler un emploi avec l’activité lucrative de conduite d’un véhicule affecté aux services de transport scolaire ou assimilés. Le projet de décret précise en outre que "cette activité accessoire lucrative ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service".

Si le projet de décret a été approuvé par le collège des employeurs du CCFP, les interrogations étaient de mise du côté des représentants des personnels. Des interrogations qui, selon Mylène Jacquot, secrétaire générale de l'Uffa-CFDT, jointe par Localtis, "ne concernent pas les employeurs publics mais portent davantage sur la partie de travail qui va éventuellement s'exercer dans les compagnies de transport privées". Les points de vigilance avancés par la représentante syndicale portent sur le temps de travail, le respect des repos entre les journées de travail, les amplitudes horaires, etc. Or ces "questions de sécurité relèveront clairement de la responsabilité des sociétés de transport scolaire", déplore Mylène Jacquot, laquelle se dit toutefois "consciente de la pénurie et consciente qu'il n'y aura pas de réponses simples à cette pénurie, alors qu'aujourd'hui des enfants ont des problèmes pour se rendre au collège ou au lycée à l'heure".

Au-delà de ce décret pour faire face à l'urgence, le gouvernement avait évoqué d'autres pistes dès cet été, dont la formation, avec notamment la rénovation du CAP conducteur de transports scolaires à compter de la rentrée 2023.

Pour sa part, Régions de France, favorable aux "bi-emplois", y compris en mobilisant des agents des collectivités, prône également l'adaptation des horaires d’ouverture des classes, la réorganisation des circuits de ramassage ou encore l'optimisation du remplissage des véhicules.