Handicapés : le plein-emploi en ligne de mire
La semaine européenne de l'emploi des handicapés s'ouvre ce lundi dans un contexte favorable. Pour la ministre chargée du dossier, Geneviève Darrieussecq, « le regard des employeurs a changé ».
Par Alain Ruello, Solenn Poullennec
A quand le plein-emploi pour les personnes handicapées ? L'évolution des chiffres depuis trois ans montre que cette perspective - thème de l'édition 2002 de la semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées qui démarre ce lundi - n'est pas si éloignée que cela. Fin juin, on comptait 460.000 inscrits à Pôle emploi, 50.000 de moins en trois ans. Le taux de chômage ? Passé de 19 % en 2017 à 13 % aujourd'hui. C'est encore un peu moins du double que celui de la population générale, mais l'amélioration est notable.
« Les efforts de sensibilisation des entrepreneurs payent. La mobilisation des dispositifs mis en oeuvre par le gouvernement nous aide, comme l'emploi accompagné. C'est aussi une période qui est riche en emplois, et qui est favorable à recruter tous les publics », assure la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq, dans un entretien aux « Echos ».
Regard changé
Perçus jusque-là sous le seul angle de leurs incapacités, les handicapés bénéficient du changement de regard des employeurs qui « découvrent avant tout leurs compétences ». Selon un récent sondage Ifop pour l'Agefiph, l'association chargée de soutenir l'emploi des handicapés dans le secteur privé, les deux tiers des recruteurs interrogés affirment que les difficultés de recrutement pourraient les inciter à recruter des profils différents.
Dans ce contexte, l'objectif de 10 % de taux de chômage est-il envisageable ? « Ce serait un très bel objectif. Il faut rester réaliste, avancer par paliers. Il faut aussi faciliter le recrutement dans le milieu ordinaire », avance, prudemment, Geneviève Darrieussecq, convaincue qu'il faut maintenir l'obligation d'emploi des handicapés, l'OETH.
Pour rappel, l'OETH impose aux entreprises de plus de 20 salariés ou plus d'employer au moins 6 % de handicapés (on en est à 3,5 % en 2021, selon la Dares, 4,5 % après majoration des plus de 50 ans ). « Il faut continuer. C'est un objectif qu'on ne peut pas lâcher. Comme pour la parité dans la vie politique, sans quota cela n'avance pas », plaide-t-elle.
Si le quinquennat précédent a été marqué par une réforme des entreprises adaptées , la mise en place des CDD tremplins et un fort soutien durant la crise Covid, celui qui s'ouvre s'annonce dans la continuité. « Beaucoup de choses sont en place, il faut les évaluer et soutenir les dispositifs qui fonctionnent bien, à l'image de l'emploi accompagné. Il faut donner un élan supplémentaire comme avec les entreprises adaptées de travail temporaire », justifie Geneviève Darrieussecq.
A tout cela s'ajoutera un effort accru sur la formation ou pour faciliter les passages vers toutes les structures en charge de l'emploi. Avec, en toile de fond, le projet France travail qui doit renforcer le diagnostic et l'accompagnement des personnes éloignées de l'emploi.
En attendant, les intéressés restent sceptiques. Le même sondage Ifop/Agefiph montre que moins d'un handicapé sur cinq croit au plein-emploi d'ici à 2027. Et de plaider pour le renforcement des sanctions pour les entreprises qui ne respectent pas l'OETH, la simplification tous azimuts des aides et services, ou encore l'amélioration de la qualité de vie au travail.
Alain Ruello Solenn Poullennec