Le 7 octobre, la ministre de la culture, Rima Abdul-MalaK, annonçait qu’un plan en faveur des métiers d’art devrait être lancé début 2023. Un petit événement en soi puisque ces savoir-faire ont longtemps été négligés par la politique culturelle française. Si le pays recèle en effet tout un écosystème en pleine effervescence de jeunes céramistes et autres artisans d’art de talent, il est aussi celui d’institutions détentrices d’un patrimoine immatériel inestimable.
Parmi les plus anciennes d’entre elles, Sèvres réunit en un même lieu de la proche banlieue de l’Ouest parisien un vaste espace de transmission, de conservation, de fabrication, de démonstration, de création et d’innovation qui se caractérise par un musée national et une manufacture de céramique dont il se murmure sur place qu’elle serait « même plus exigeante et plus pointue qu’au moment de sa création, au XVIIIe siècle ».
Situé entre la Seine et le parc de Saint-Cloud, cet ensemble de 4 hectares composé d’un agencement en U de bâtiments de production et d’un musée en pierre calcaire d’Ile-de-France construit entre 1876 et 1880, jouxte aujourd’hui une voie rapide, qui camoufle ce lieu typique de l’architecture industrielle de cette époque, une structure métallique habillée de pierre, de deux ou trois niveaux, parfois en étages, imaginés comme des espaces cathédrales avec une imposante hauteur sous un plafond voûté.
Jusqu’au 7 mai 2023, les curieux peuvent monter au dernier étage pour l’exposition « Formes vivantes », qui explore les liens entre l’art minéral et le vivant. Des prothèses corporelles utilitaires contemporaines aux assiettes ornées d’animaux et de végétaux du XVIe siècle de Bernard Palissy, des langues dégoulinantes de l’artiste Marc Alberghina en faïence émaillée aux vases Art nouveau, c’est un étonnant cabinet de curiosités que nous sommes invités à parcourir, panorama de ce que les arts du feu peuvent produire de plus inattendu.
Figé dans le passé
C’est dans cette institution étatique, fondée par Madame de Pompadour, la favorite de Louis XV et grande mécène, que sont fabriqués des vases et des services de la table en porcelaine, des bijoux, de la sculpture, du mobilier, du luminaire… Environ 3 000 pièces sont réalisées chaque année par les 120 artisans céramistes répartis en 30 métiers. Les trois quarts de la production sont mis en vente dans la galerie parisienne de l’institution, place André-Malraux, dans le 1er arrondissement parisien, ou, depuis quelques années, dans des foires d’art et de design, tandis que le reste est attribué à l’Etat pour des cadeaux diplomatiques ou utilisé par l’Elysée, Matignon, le ministère de la culture ou des ambassades.
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