Grâce à leurs gestes moins approximatifs, certains collégiens s’en sortaient mieux que les adultes. C’est en tout cas ce que rapportent ceux qui les ont observés et encadrés à l’automne 2021, lorsque Van Cleef & Arpels a lancé « De mains en mains », un événement lyonnais destiné à initier des jeunes – et plus largement le grand public – aux métiers de la joaillerie. Une expérience qui a suscité suffisamment d’enthousiasme pour être renouvelée cette année, du 26 novembre au 4 décembre.
« Si vous souhaitez toucher les gens et recruter en ayant une diversité de profils, il faut se faire connaître au-delà d’un cercle d’habitués. Sinon, ce sont toujours les mêmes qui postulent », indique Marie-Aude Stocker. En 2020, cette diplômée de l’ESCP, directrice des ressources humaines du joaillier depuis 2018, suggère de bâtir un projet pédagogique sur l’activité de Van Cleef & Arpels. « Juste après le premier confinement, les médias relataient à quel point les jeunes, réduits à des cours en distanciel, paumés face à l’état du monde, se sentaient désorientés. L’idée de leur montrer que notre secteur pouvait embaucher et procurer un épanouissement professionnel est venue de là. »
Pour sortir du parisianisme, l’état-major de la marque choisit Lyon, où Van Cleef & Arpels, fondé en 1906, possède des ateliers. En passant par Télémaque, une association qui promeut l’égalité des chances, Marie-Aude Stocker entre en contact avec le rectorat de l’académie. Ce dernier désigne un établissement : le collège Jules-Michelet, à Vénissieux, qui figure parmi les REP + (réseaux d’éducation prioritaire renforcés). C’est ainsi que, il y a un an, des artisans de Van Cleef & Arpels sont allés à la rencontre de 300 collégiens de 4e et de 3e pour leur montrer leurs savoir-faire et leur permettre de s’essayer à certains gestes.
Limer, polir, sertir
Les jeunes ont ainsi pu limer les ailes des pendentifs en forme de papillon, polir un métal satiné pour lui conférer de l’éclat, sertir des pierres dures sur un trèfle à quatre feuilles Alhambra (le best-seller de la marque, qu’ils ont peut-être aperçu sur TikTok) et découvrir les rudiments de la conception en 3D. « On voit d’emblée chez certains ce qu’on appelle l’intelligence de la main, raconte un cadre de Van Cleef qui a assisté à l’atelier. C’est épatant et de l’ordre de l’intuition : une façon de tenir l’outil, de faire preuve de délicatesse… »
Les questions posées par les collégiens tournent toujours autour des mêmes thématiques : « A quoi ressemblent vos journées ? », « Combien de temps faut-il pour faire un bijou ? » et, forcément, « Combien gagnez-vous ? » « Je leur répondais que, bien sûr, les salaires n’étaient pas ceux des footballeurs, mais que, dans nos métiers, il y a l’esprit du collectif, un savoir-faire technique et la garantie de l’emploi. »
Après la première édition, une jeune fille de 14 ans s’est engagée dans un CAP. « Longtemps, dans les ateliers de joaillerie, on forgeait le métal, ce qui exigeait de la force physique, explique Eric de Rocquigny, directeur des opérations et des métiers. Le développement de la fonte à cire perdue, puis de la conception assistée par ordinateur et le perfectionnement des outils de sertissage, inspirés notamment par ceux de la médecine dentaire, ont laissé davantage de place aux femmes. »
Si Marie-Aude Stocker assure que « De mains en mains », manifestation accompagnée par des démonstrations et une exposition à l’Hôtel-Dieu, « n’a aucun objectif ferme d’embauches », elle a noté que des adolescents tendaient volontiers leur CV. Des tables rondes et un espace dédié aux renseignements professionnels viennent donc étoffer la deuxième édition. Celle-ci, toujours pensée pour toucher environ 300 élèves, s’ouvre aussi à un second collège (Les Battières, à Lyon), à deux nouveaux métiers (le dessin joaillier et le lapidage, c’est-à-dire la taille des pierres), et s’étend sur deux week-ends.
« De mains en mains », par Van Cleef & Arpels, à l’InterContinental Lyon-Hôtel-Dieu, 20, quai Jules-Courmont, Lyon 2e. Du 26 novembre au 4 décembre.
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