Julia Sedefdjian, plus jeune cheffe étoilée, et « redevable aujourd’hui à des gens qui m’ont donné cette passion »

Plus jeune cheffe étoilée de France à 21 ans, Julia Sedefdjian a été invitée par le CROUS de Créteil pour préparer un repas aux 1300 étudiants qui fréquentent celui de l’université Paris 8 en décembre dernier. Engagée, solidaire, elle nous a raconté son parcours et comment elle est arrivée en cuisine.

    En décembre dernier, 1300 étudiants de Paris 8 ont dégusté un repas un peu particulier. Cuisiné avec les contraintes du CROUS, accessible aux tarifs classiques pour les étudiants, il a été concocté par Julia Sedefdjian, la plus jeune cheffe étoilée de France. Hyper-engagée, à 27 ans, elle l’a déjà été deux fois, étoilée : à 21 ans, aux Fables de la Fontaine dans le 7e arrondissement à Paris, puis une deuxième fois en 2019 dans son propre resto, Baieta, à Paris toujours.



    En dehors de la cuisine, elle a une autre passion et un autre engagement : former et soutenir les jeunes. Quand elle accepte de se prêter au jeu des questions-réponses, la jeune niçoise revient à peine d’une semaine à Dakar où elle a participé à un dîner de gala. L’objectif ? Récolter des fonds, reversés à un hôpital pédiatrique qui les utilisera pour avoir l’eau courante dans le bloc opératoire. Conseils et expériences, elle partage ce qui lui a permis de réussir et ce qui la nourrit.

    Tu as commencé la cuisine adolescente par un apprentissage à 14 ans. Un peu au hasard aussi, non ?

    Oui, j’ai commencé tôt en cuisine ! J’étais un bébé, je ne savais pas tenir un couteau. Dès l’adolescence, j’ai su que je voulais faire un métier qui me permette d’utiliser mes mains et qui me donne rapidement de l’autonomie, car je ne voulais pas continuer mes études. Je cuisinais un peu à la maison et j’adorais manger. Le père de ma marraine était cuisinier, il faisait des chocolats, des bûches et ses anecdotes me faisaient marrer. Je me suis dit « pourquoi pas la pâtisserie », puis la cuisine.

    Tu as été pas mal boostée par ton chef à Nice. Suivre ses conseils a été une bonne chose pour toi pour la suite ?

    J’ai fait deux ans de CAP cuisine et au bout de deux ans, mon chef m’a dit « Juju, tu vas faire un CAP pâtisserie aussi, tu me remercieras plus tard quand tu auras ton resto ! ». Il a eu raison, ça me sert au quotidien ! Je suis redevable aujourd’hui à des gens qui m’ont donné cette passion.

    Aujourd’hui tu renvoies l’ascenseur ?

    Beaucoup de jeunes viennent chez nous, oui. Les rencontres commencent toujours comme ça : quelqu’un qui dit que son frère veut faire un stage de 3e ou quelqu’un de la Croix Rouge qui me dit qu’il est en contact avec un jeune qui, s’il ne trouve pas de stage, ne peut pas rester en France. On accueille des jeunes en difficulté et qui veulent travailler en cuisine. Je les rencontre, pour voir leurs profils et on se met d’accord sur des dates de stages, de trois semaines à deux mois voire plus quand on en garde certains en apprentissage.



    Ils nous racontent avoir beaucoup cuisiné quand ils étaient en Afrique, au Maroc, en famille, mais qu’aujourd’hui, en France, ils ont besoin de travailler, ils en ont envie et arrivent avec un certain état d’esprit. Même pour une semaine, c’est une histoire de partage. Et au final, c’est un échange de fou ! Ils arrivent, ils racontent leur histoire, leur famille, leur culture et c’est ça aussi qui donne envie de donner à notre tour : ils n’ont rien, eux, et ils donnent tout. On ne se rend pas compte de la chance qu’on a.

    Ce que tu fais avec les jeunes que tu accueilles dans ton resto…

    Le but c’est qu’ils voient comment s’organise la restauration, comment on y travaille aussi : ils font des demi-journées, mais ils savent que le soir, on est là, et quand ils arrivent le matin, on est déjà là aussi. On les aide à se sentir en confiance et à avoir envie de travailler dans la restauration. Il faut s’accrocher, au moins au début. C’est un métier difficile mais comme dans tous les métiers, il y a toujours des parties cools et des parties moins cools.

    Tu es un peu un modèle ?

    En partie oui… Dans les lycées hôteliers, je fais des jurys pour les épreuves et des jeunes viennent me voir pour me dire que c’est grâce à moi qu’ils se sont lancés ! Il faut continuer à donner une bonne image de la cuisine !

    Et dans la partie cool du métier, tu peux même te retrouver à cuisiner pour d’autres étudiants… Pourquoi as-tu accepté la proposition du CROUS ?

    Ça fait partie des sujets d’actu de savoir que les jeunes ne mangent pas forcément à leur faim et ça me touche beaucoup. On est tous un peu passé par là, au début de notre vie pro et si je peux faire quelque chose dans ce sens-là, ça me fait plaisir.



    J’ai imaginé le menu avec beaucoup de légumineuses, car ce n’est pas très cher, et j’ai aussi fait une proposition végétarienne, à la demande des élèves. Le chef du CROUS cuisine déjà un peu aussi…

    On peut manger au CROUS comme dans ton resto ?

    Ce que je fais au resto, ils ne peuvent pas le faire là-bas. L’équipe est petite… Ils sont 5 pour servir entre 1000 et 1500 couverts. Je me suis adaptée aux contraintes et à ce qu’on peut faire avec l’espace, le temps et l’humain, mais je suis cheffe étoilée d’un resto de 5 personnes qui envoie 80 couverts ! Au CROUS on doit s’adapter aux prix à ne pas dépasser, mais avec de l’ingéniosité et du savoir-faire, on peut faire quelque chose ! À partir du moment où on met un peu de sel, un peu d’épices et un peu d’amour, tout de suite c’est complètement différent !

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