« J’ai une élève qui ressemble physiquement à un garçon (habillement, comportement physique, coupe de cheveux). Comment l’accompagner dans sa recherche d’identité ? Je dois la recevoir prochainement. Comment entamer l’entretien, par exemple ? » « D’où vient la transidentité ? Est-elle le résultat d’une construction sociale ou d’un fonctionnement biologique, ou les deux ? » « J’entends dire que les personnes trans, après avoir fait leur coming out, auraient un fort taux de suicide. Est-ce la réalité ? »
Derrière leur écran d’ordinateur, une soixantaine de personnels de l’académie de Reims (Marne) participent à un webinaire intitulé « Pour une meilleure prise en compte des élèves LGBTQ à l’école », en cet après-midi d’octobre. Ils sont enseignants, assistantes sociales, infirmières, conseillers principaux d’éducation, et s’interrogent sur comment accompagner au mieux les élèves concernés. Beaucoup de questions tournent autour de la transidentité, auquel les deux intervenantes, la sociologue du genre Gabrielle Richard et la professeure en sciences de la vie et de la Terre, et experte sur ces thématiques, Mika Alison, consacrent une grande partie de la session.
Le personnel des collèges et des lycées voit régulièrement, désormais, des élèves en transition. « Un ou deux par année », estime un proviseur d’un lycée francilien d’un millier d’élèves. « Un effet de mode ? », demande un participant au webinaire. Certainement pas, répondent les intervenantes. Mika Alison, autrice de Vivre sa transidentité à l’école. Parcours et point de vue d’une transeignante (Double ponctuation, 150 pages, 16 euros), retrace son parcours de femme trans pour en témoigner : « J’ai commencé à m’identifier au féminin en classe de première, mais jamais l’idée d’en parler publiquement ne me serait venue il y a vingt ans. » Pour la presque quadragénaire, « tout a changé avec les réseaux sociaux » : « Les jeunes ont désormais accès à des connaissances et à une communauté en ligne. La possibilité de se vivre et de se dire trans est plus facile aujourd’hui. »
Cas par cas « pas toujours facile à appréhender »
Face à cette nouvelle génération, proviseurs et principaux, au premier chef, reçoivent ces dernières années des demandes jugées inédites dans une institution scolaire très normative et genrée. Il y a, par exemple, ce chef d’établissement breton qui se souvient de « cette jeune fille qui veut devenir garçon » et souhaite de ce fait dormir dans une chambre de garçons lors d’un voyage scolaire ; cette proviseure francilienne désarçonnée par la demande de changement de prénom d’un autre garçon trans ou cette conseillère principale d’éducation parisienne qui s’est battue pour qu’un élève garçon puisse porter vernis à ongles, maquillage et sac à main dans l’établissement, malgré les réticences de ses collègues.
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