C’est une histoire qui résume à elle seule tous les paradoxes de l’enseignement public : comment faire vivre la mixité scolaire et offrir en même temps des enseignements atypiques ? Le 8 novembre, la région Ile-de-France et le rectorat de Paris ont confirmé la fermeture de sept lycées à la rentrée 2023, arguant d’une forte baisse d’effectifs et de la vétusté de certains locaux. La nouvelle s’était répandue parmi les parents d’élèves et les enseignants parisiens, avant même son annonce officielle. Elle s’accompagne d’une réorganisation de l’offre scolaire dans la capitale, avec le transfert de toutes les formations vers d’autres lycées.
Parmi les établissements fermés, deux sont à vocation artistique. Le lycée professionnel Brassaï, dans le 15e arrondissement, prépare au bac pro photographie. Ses élèves vont être transférés au lycée Louis-Armand, dans le même arrondissement – ce dernier perdant au passage ses classes de formation générale. Le lycée général Georges-Brassens, dans le 19e arrondissement, lui, est spécialisé dans les « double cursus » pour les élèves des conservatoires (Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, conservatoires à rayonnement régional de Paris et de Boulogne), et de la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique. Toutes ses divisions doivent être transférées au lycée Henri-Bergson, également dans le 19e.
Dans ces deux établissements, les parents d’élèves dénoncent la « brutalité » du changement, et regrettent de se voir imposer un établissement qu’ils n’ont pas choisi. La majorité municipale du Conseil de Paris a voté, le 17 novembre, un vœu contre la fermeture des sept lycées. Des élus locaux se mobilisent ; les députés ont été alertés.
« La greffe prendra »
Dans une réponse à la sénatrice (écologiste) de la Gironde Monique de Marco, qui l’interpellait sur le cas du lycée Georges-Brassens, le ministre de l’éducation, Pap Ndiaye, défend la décision de la région. Il évoque les 8 000 places de lycée vacantes dans Paris intra-muros, à mettre en regard avec le fort besoin de création de places en Ile-de-France – la présidence de la région évalue un besoin de 30 000 places en lycée supplémentaires, d’ici à la fin des années 2020, dans les départements franciliens.
Pap Ndiaye évoque également, dans ce courrier que Le Monde a pu consulter, un lycée « éloigné de sa vocation initiale » puisque, « en 2021-2022, seuls 44 % des élèves de première et 34 % des élèves de terminale ont choisi une spécialité danse ou musique ». Un argument qui fait bondir les parents. Au contraire, arguent-ils, le double cursus permet aux élèves de tirer parti des autres spécialités du lycée général. « C’est tout l’intérêt du dispositif, défend Ariane (elle ne souhaite pas communiquer son nom), mère d’une élève de seconde, membre de la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique. Les enfants ont le choix jusqu’au bout. Certains deviendront artistes professionnels, d’autre non ! »
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