Ce n’est pas la première fois qu’il se frotte à des « sujets santé », et en tant qu’ex-directeur du cabinet de Jean Castex à Matignon ou ancien patron de l’Assurance-maladie, Nicolas Revel est un habitué des chantiers compliqués. Mais celui qu’il a ouvert, mardi 13 décembre, comme directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), en rendant publiques 30 « pistes d’action », bénéficie d’un écho particulier. Une étape décisive pour ce haut fonctionnaire de 56 ans, qui a succédé en juillet à Martin Hirsch à la tête de l’AP-HP, et plus connu, jusqu’à présent, des syndicats de médecins libéraux que de la communauté hospitalière.
Or celle-ci attend beaucoup de ses premiers engagements : alors que, depuis des semaines, les alertes partent de tous les services ou presque (pédiatrie, psychiatrie, urgences…), alors que la « triple vague » épidémique sévit, mêlant les virus de la bronchiolite, du Covid et de la grippe, et pesant d’autant sur les soignants, la feuille de route de Nicolas Revel s’adresse, d’abord, à 100 000 personnels en demande de gestes forts.
Fort, le diagnostic l’est : c’est à des « difficultés inédites » que le mastodonte de 38 établissements franciliens doit faire face, reconnaît, dès l’introduction du document présenté à la presse, mardi, M. Revel. Invité de France Inter, il a donné à ces difficultés une traduction chiffrée : dans le plus grand groupement hospitalier d’Europe, 16 % des lits sont fermés, soit près de 2 000 sur 12 000 ; c’est deux fois plus qu’en 2019. En 2022, 2 800 infirmières et infirmiers ont quitté le navire amiral du système hospitalier, quand 2 200 ont été embauchés. Moins de bras, cela implique moins d’activités et donc, aussi, moins de recettes : l’AP-HP s’apprête à boucler un troisième exercice consécutif à plus de 200 millions d’euros de déficit.
« Donner envie de venir à l’AP-HP »
« Il y a un effet post-Covid, même s’il n’explique pas tout, a souligné le haut fonctionnaire à la radio. Des personnels veulent partir en province, d’autres, changer de métier. Ils ont le sentiment que leur travail est plus lourd, plus difficile… » La « dynamique des départs », comme on dit à l’AP-HP, en préférant cette expression à celle, martelée sur le terrain, d’« hémorragie de soignants », a été plus importante en 2022 que lors des précédentes années : les hôpitaux parisiens ont vu partir 2 400 infirmiers en 2021, 1 900 en 2020, 2 300 en 2019…
Pour casser la tendance, l’enjeu pour l’institution est de recruter de nouveaux soignants… et de les garder dans ses rangs. Mais comment faire, quand on ne dispose pas du levier des salaires ? Nicolas Revel renvoie sur ce point la balle à l’Etat. « J’ai travaillé sur d’autres leviers pour améliorer les conditions de travail au quotidien, donner envie de venir à l’AP-HP, donner envie d’y rester. »
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