Parité homme-femme dans la tech : où en sommes-nous ?

La directrice générale d’Angers French Tech revient pour nous sur les enjeux de l’égalité homme-femme, dans un secteur qui doit encore faire ses preuves.

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La parité dans l’écosystème tech permettrait non seulement de répondre à l’enjeu sociétal, mais également de faire face à la pénurie de talents. © Knut - stock.adobe.com
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Corine Busson-Benhammou, Directrice générale d’Angers French Tech

Diplômée du CHEID en décembre 2021, j’ai obtenu auparavant un master en communication et management des médias à Sciences Com (Audencia). Je dirige La Villa Angers French Tech, un lieu unique de rencontre et d’évolution pour les startups méritantes. J’ai été en charge des relations presse institutionnelles, avant de prendre la direction de la communication d’Angers French Tech. Forte d’un réseau industriel et technologique multinational, j’ai assuré la promotion du label French Tech au niveau local, national et international. La place des femmes dans la tech, et peut-être encore plus dans l’électronique, est également un enjeu majeur et une préoccupation quotidienne pour moi. En 2022, nous avons organisé un forum international sur la parité dans la tech.

Quelle est la proportion des femmes parmi les professionnels du secteur de la tech ? Comment expliquer un tel chiffre ? La France est-elle en retard par rapport à d’autres pays d’Europe ?

La situation de la parité dans la tech est extrêmement problématique en France. En 2022, la proportion des femmes dans le monde de la tech a difficilement atteint 17 % (source : Gender Scan 2022), nous arrivons tout juste à atteindre le niveau de l’Union européenne.

Cette situation s’explique par de nombreux facteurs. Les stéréotypes genrés, notamment autour du secteur de la tech, s’ancrent très tôt dans l’imaginaire collectif des enfants. La formation n’est également pas à la hauteur, puisque seulement un quart de femmes décrochent des diplômes en tech dans les écoles.

Aujourd’hui, ce secteur doit se montrer plus inspirant pour les jeunes filles en quête d’orientation.

Au niveau de l’Union Européenne, une prise de conscience commence à naître au niveau des instances dirigeantes, comme l’initiative Women TechEU lancée en 2021, visant à soutenir des entreprises pilotées par des femmes, mais beaucoup de travail reste encore à faire.

Dans le secteur de la tech, y a-t-il des métiers où la parité est particulièrement loin d’être atteinte ?

De manière générale, ce sont les postes à fortes responsabilités au sein des équipes dirigeantes qui souffrent le plus de ce manque de représentation. Les entreprises du French Tech 120 et du Next 40, sélectionnées pour leur capacité à devenir de futurs leaders mondiaux, nous en donnent l’exemple parfait. Ce programme, qui permet aux 120 startups et scaleups françaises les plus prometteuses et performantes d’être accompagnées dans leur développement par la French Tech Nationale, a fait l’objet d’un rapport édifiant de BCG et SISTA.

En effet, seulement 13 % des postes du noyau exécutif du programme French Tech 120 sont occupés par une femme (dont 7 femmes CEO). De même, au sein du label Next 40 exclusivement, aucune femme n’est à la tête d’une startup. Pire encore : 23 % de ces entreprises n’ont aucune femme dans un poste de direction.

La parité dans l’écosystème permettrait non seulement de répondre à l’enjeu sociétal de représentation de la pluralité des profils de la population française, mais également de faire face à la pénurie de talents à laquelle le secteur de la tech doit faire face depuis plusieurs années.

Plus globalement, quelles sont les inégalités F/H constatées dans le secteur de la tech ?

L’écosystème tech n’échappe pas à l’inégalité salariale qui touche les femmes dans le monde du travail. Pour un poste similaire, au sein d’une même entreprise, on retrouve un écart salarial moyen de 5 % dans les startups européennes (source : Figures).

Le plafond de verre les écarte également des postes comme directrice des nouvelles technologies (2 % des femmes dans le French Tech 120), pour des postes plus transversaux et moins techniques, comme les Ressources Humaines ou le marketing (respectivement 67% et 50%). À l’échelle des startups, c’est donc toute une culture d’entreprise qu’il faut changer afin de mettre en place une politique dédiée à la parité et l’inclusivité, qui permettrait de réduire les différences de gestion de carrières entre les hommes et les femmes.

Avec le “Pacte Parité” mis en place, la French Tech s’engage à atteindre 20 % de féminisation des conseils d’administration au sein de la French Tech d’ici moins de 3 ans. Quelles sont les actions mises en place pour remplir cet objectif ?

Les actions mises en place sont les suivantes :

  • Acculturation,
  • Sensibilisation,
  • Formation,
  • Présentations dans les entreprises.

L’objectif : que les entreprises prennent conscience de l’importance de la parité !

Pour en savoir plus sur le Pacte Parité, rendez-vous sur ce lien.

La parité F/H dans la tech concerne toutes les entreprises. Avez-vous des exemples de bonnes pratiques qui ont été mises en place dans certaines organisations, pour attirer et retenir les talents féminins ?

Oui, bien sûr. Certaines entreprises de notre territoire prennent en charge le coût et l’accompagnement de MBA pour leurs salariées. Le turnover est exceptionnel.

D’autres embauchent des littéraires et les forment aux métiers de la Tech pendant 6 mois. Là encore les femmes sont reconnues et se révèlent, avec un turnover exemplaire également !

Le secteur de la tech connaît actuellement des difficultés en termes de recrutement. Un meilleur accès aux métiers de la tech pour les femmes pourrait-il répondre à cette problématique ?

Tout à fait. Quand on évoque les pénuries de jobs dans le numérique, le meilleur des viviers pour combler ce déficit est la réserve des « femmes ». Il est sous-évalué, peu identifié, voire nié. Il est essentiel et devrait être une priorité nationale.

Vous organisez l’événement Connected Women, dont la première journée est consacrée à l’accueil de groupes scolaires et de familles. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Nous avons fait ce choix pour qu’il y un rapprochement du monde académique et des entreprises. Il faut combler ce gap qui constitue un frein à l’inspiration des collégiennes et lycéennes aux métiers de la tech.

Quand ces jeunes filles rencontreront des femmes chefs d’entreprise singulières et charismatiques, les choix d’orientations suivront !

Quel conseil donneriez-vous à une jeune femme qui souhaite entreprendre une carrière dans la tech ?

De se sentir libre d’aller où elle veut aller. Cela s’appelle l’égalité des chances. Il n’est pas de portes qui nous sont fermées. Elles sont difficiles à ouvrir et les écueils seront nombreux mais audace, volonté et détermination sont notre force. Il faut combattre ce manque de parité et le fait que cela ne soit pas consensuel encore aujourd’hui, pour nous mais surtout pour nos filles et les générations à venir.

Nous ne sommes plus dans un remake de Mad Men, il faut ouvrir les yeux, s’accrocher, foncer et se révéler.

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