Portrait

Enguerran, de torche humaine au Puy du Fou aux études de jeux vidéo

A gauche, Enguerran dans ses habits de tous les jours et à droite on le retrouve en torche humaine dans le spectacle des Vikings au Puy du Fou.
A gauche, Enguerran dans ses habits de tous les jours et à droite on le retrouve en torche humaine dans le spectacle des Vikings au Puy du Fou. © Photos fournies par le témoin
Par Pauline Bluteau, publié le 23 décembre 2022
7 min

À 25 ans, Enguerran a déjà eu mille vies. Après avoir voulu arrêter ses études dès le bac pro, il est devenu cascadeur au Puy du Fou. Plusieurs expériences professionnelles plus tard, il a décidé de reprendre le chemin de l'école pour travailler dans le secteur des jeux vidéo. Il raconte.

C'est à La Breille-les-Pins (49), chez ses parents, qu'Enguerran suit ses cours de 3D, cinéma, design et jeux vidéo. Depuis septembre 2022, l'étudiant a intégré la prépa art de l'Institut Artline, une école de la création numérique en ligne.

Difficile alors de s'imaginer qu'il y a encore quelques années, le jeune homme était cascadeur. Un métier qu'il n'avait d'ailleurs jamais vraiment envisagé. Portrait d'un étudiant plein de ressources.

Du bac pro à l'école de cascadeurs

"J'ai fait un bac pro procédés de la chimie et de l'eau mais ça ne me plaisait pas. En tant que dyslexique et dysorthographique, je n'étais pas fait pour l'école", commence Enguerran. Il finit par tomber, par hasard, sur une école de cascadeurs. Sportif, initié aux sports de combat, il s'inscrit au Campus Univers Cascade. "Je suivais des sessions pendant les vacances scolaires mais au fur et à mesure, la formation a empiété sur le lycée. J'ai donc décidé d'arrêter mon bac pro en milieu de première."

La formation s'étale sur deux ans, chaque session dure deux semaines. "C'est très intensif : on commence par faire de la muscu, on a des cours, on est réparti par groupes pour apprendre le métier. Et entre les sessions, on s'entraine personnellement."

L'école est alors installée à Agen (47). Une centaine d'apprentis-cascadeurs s'y retrouvent, certains sont déjà professionnels. "C'est la première fois que j'étais seul et loin de ma famille. Mais ça m'a tout de suite plu même si je me suis demandé où j'avais atterri parce que c'est vraiment très physique. On nous pousse à bout mais après ça va." Les diplômés peuvent ensuite tourner dans des films comme Dune, Fast and Furious, James Bond ou Taken.

Un contrat de torche humaine au Puy du Fou

Ce "métier-mythe", comme le décrit Enguerran, l'a d'ailleurs longtemps fait rêver. "J'ai trouvé incroyable de me retrouver avec des coachs que j'admirais quand j'étais plus petit." Entre deux sessions, il décide de se lancer et s'intéresse aux offres d'emploi. "J'ai vu que le Puy du Fou cherchait des cascadeurs… J'ai postulé, complètement par hasard !"

Il comprend qu'il peut tenir le rôle de torche humaine dans le célèbre spectacle des Vikings. S'enflammer, l'étudiant ne l'avait encore jamais fait à l'école. "En fait, on ne réfléchit pas, on n'oublie qu'on est en feu, il y a un effet tunnel, raconte-il. Il ne faut pas être claustrophobe parce que la combinaison est assez oppressante et on ne peut pas trop respirer. Mais c'est trop cool, c'est stylé !"

À 19 ans, il signe donc son premier contrat en tant que cascadeur. Sa saison au sein du parc vendéen dure environ quatre mois. "Le premier spectacle était incroyable, au moment du salut final, j'ai eu beaucoup d'émotion. Je me disais qu'il y a encore quelques années, j'étais sur les gradins à admirer ces cascadeurs et maintenant, je suis à leur place. Et puis le Puy du Fou, ce n'est pas une entreprise comme les autres. C'est fun, on n'a pas l'impression de travailler."

Apprendre à dessiner pour concevoir des jeux vidéo

Après cette première expérience, qui sera aussi la dernière (enfin pour l'instant), il se forme au métier d'agent de sécurité incendie et travaille dans une centrale nucléaire, en magasin. "C'est moins drôle !", plaisante-il. Petit à petit, Enguerran décide de tourner la page. "Je ne m'entrainais plus donc je n'étais plus au niveau et je n'avais ni les moyens ni l'envie de m'installer à Paris ou vivre à l'étranger." Il a l'idée de devenir scaphandrier mais se tourne finalement vers un domaine qui l'intéresse depuis le collège : le jeu vidéo.

En troisième déjà, il avait eu l'opportunité de faire un stage dans une entreprise du secteur. "Mais comme je ne savais pas dessiner, on m'a dit que ce n'était pas pour moi. J'ai perdu espoir." Des années plus tard, il reprend le stylo et commence à créer sur sa tablette. Il regarde des tutos, participe à des petites formations.

"Je voudrais devenir modélisateur 3D donc je me suis renseigné pour intégrer une école et j'ai choisi Artline." Quatre mois que l'étudiant, qui ne se voyait pas retourner en salle de classe comme au lycée, suit sa prépa à distance. "Mon expérience professionnelle m'a donné de la maturité. Je n'aurais pas pu faire cette école à 20 ans. Là, j'ai un planning et je m'y tiens, comme un travail. Mais il faut être passionné, je ne vois pas cette formation comme une contrainte", souligne-t-il.

"Foncer même si on ne rentre pas dans une case au lycée"

Plutôt que d'affirmer que son parcours sort de l'ordinaire, Enguerran retient de ses différentes expériences, ses relations et ses "belles rencontres". Il estime avoir appris à travailler seul, à être autonome et à se "pousser", utile pour quelqu'un qui souhaite devenir entrepreneur.

"Je me suis beaucoup cherché et je me cherche encore. J'ai eu la chance d'avoir des parents derrière moi, qui m'encouragent et qui sont fiers. Bon, ça arrange bien ma mère que j'aie finalement choisi un métier de bureau", s'amuse-t-il.

Parce que tout n'a pas été rose. "Je sais à quel point le lycée est difficile mais même si on ne rentre pas dans une case, il faut foncer et faire ce qu'on veut faire. Quand j'ai dit à mes profs que j'allais faire une école de cascadeurs, ils ne m'ont pas pris au sérieux et m'ont rétorqué que ce n'était même pas un métier. Je suis la preuve que si !" Comme quoi, se considérer comme "une tête brûlée" peut parfois avoir ses bons côtés.

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