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Décryptage

Retraites : Elisabeth Borne insiste sur la « justice » de sa réforme pour tenter de convaincre les Français

La Première ministre a annoncé ce mardi le recul de l'âge légal de la retraite à 64 ans en 2030. La réforme doit entrer en vigueur dès septembre et la pension minimum augmenter y compris pour les retraités actuels. Les syndicats ont répliqué en annonçant grèves et manifestations dès le 19 janvier.

La réforme doit entrer en vigueur en septembre 2023.
La réforme doit entrer en vigueur en septembre 2023. (AFP)

Par Isabelle Ficek

Publié le 10 janv. 2023 à 20:01Mis à jour le 10 janv. 2023 à 20:55

Comment convaincre des Français très majoritairement opposés à la réforme des retraites ou du moins essayer d'adoucir leur regard ? C'est la difficile tâche à laquelle s'est attelée ce mardi la Première ministre, Elisabeth Borne, en dévoilant la réforme des retraites devant la presse avant de la défendre lors du 20 Heures de France 2 puis de répondre aux questions des auditeurs de Franceinfo.

Evoquant un « choix politique essentiel » pour « préserver notre système de retraite par répartition », Elisabeth Borne s'est dite consciente des « interrogations » que la réforme suscite : « Il faut y répondre et convaincre », a-t-elle martelé. « Nous conservons une ambition de justice et de progrès », a promis la cheffe du gouvernement.

Un Français sur cinq

Sur la nécessité de la réforme, elle a déclaré que l'aggravation des déficits est « un fait, pas un argument politique », fustigeant la « démagogie » de ceux qui voudraient baisser l'âge légal. Elle a également tenté de clarifier un point irritant : « chaque euro cotisé servira à financer nos retraites, rien d'autre », a-t-elle tranché.

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Surtout, la Première ministre a assuré « mesurer ce que signifie de demander de travailler un peu plus longtemps » - la seule mesure jusqu'ici retenue par les Français -, mais elle n'a eu de cesse de tenter de l'adoucir avec les volets « justice » et « progrès ». La réforme, qui doit entrer en vigueur dès septembre 2023, propose de décaler l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans en 2030 et d'accélérer l'allongement de la durée de cotisations à 43 ans dès 2027 (soit aussi un trimestre de plus par an). Mais personne ne devra travailler plus de 44 ans. Et l'âge de la fin de la décote demeurera à 67 ans.

« Un projet universel », qui concernera tout le monde

« C'est essentiel pour ceux qui ont eu une carrière hachée ou incomplète et notamment les femmes », a-t-elle insisté. « Ce projet est universel car il concernera tout le monde », a-t-elle aussi prévenu. Sous-entendu, les fonctionnaires comme les agents des régimes spéciaux pour le décalage de l'âge de deux ans. Même si l'extinction des régimes spéciaux (EDF, RATP) ne concernera que les futurs embauchés.

Sur le pilier justice, Elisabeth Borne a assuré vouloir « améliorer » le dispositif carrières longues, pour le « rendre plus juste et plus lisible ». Il touchera ceux ayant commencé à travailler avant 16 ans, avant 18 ans - une nouvelle borne intermédiaire - et avant 20 ans, avec des départs à partir de 58, 60 et 62 ans. « Ce sont un Français sur cinq partant à la retraite qui pourront bénéficier de ces dispositifs carrières longues », a-t-elle affirmé.

Sur la prise en compte de la pénibilité et le fonds prévention, elle a mis en avant des « avancées sociales tout au long de la carrière ». Enfin, certaines professions pourront continuer à « partir plus tôt » a souligné Elisabeth Borne - militaires, catégories actives de la fonction publique, aides-soignants à l'hôpital… - et les règles ne changeront pas, entre autres, pour l'invalidité.

« Au total, quatre Français sur dix partant à la retraite chaque année pourront avoir des départs anticipés et ne seront pas obligés de travailler jusqu'à 64 ans », a-t-elle tenté de rassurer. Reste que ces dispositifs n'empêchent pas des effets de seuils pour ceux ayant commencé à travailler à 21, 22 ans…

Grogne chez les artisans

Enfin, au volet « progrès social », Elisabeth Borne a mis en avant la hausse du minimum contributif pour une carrière complète à 85 % du SMIC, dès septembre. « Une vie de travail doit apporter une retraite digne », a-t-elle fait valoir. Et ce, non seulement pour les futurs retraités, mais aussi, pour les retraités actuels, ce qui doit concerner 2 millions de personnes.

C'était une demande notamment de la majorité, mais aussi de LR et de la CPME, de l'U2P. Sachant que 60 % de ceux qui bénéficient du minimum contributif sont des femmes ou des indépendants, la grogne actuelle chez les boulangers et plus largement les artisans, a pesé lourd, outre le besoin de l'appui de LR, dans la décision d'élargir cette mesure. Elle sera intégrée dans le texte qui sera présenté en Conseil des ministres le 23 janvier et qui aura la forme d'un projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificatif.

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Sans surprise, l'intersyndicale a annoncé dans la foulée une journée de mobilisation dès le 19 janvier . Le patronat a lui, via le Medef, salué des « décisions responsables et pragmatiques » et l'U2P s'est félicitée de voir « l'essentiel » de ses conditions pour son adhésion « réunies ». Pour LR, le président du groupe à l'Assemblée, Olivier Marleix, a dit avoir été « entendu » sur les 64 ans et le minimum contributif pour les retraités actuels. La gauche a fustigé la réforme et Marine Le Pen à l'extrême droite aussi.

Le gouvernement ne doute pas que les remous à venir seront importants, mais l'inconnue - et les craintes chez lui comme chez une partie des syndicats - est de savoir si des mouvements hors cadre émergeront.

Isabelle Ficek

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