Quand, à Noël, après trois mois, Capucine l’a retrouvé, Mattéo avait gagné « quelques centimètres et beaucoup de maturité ». Le jeune homme a mis sa scolarité française sur pause pour étudier une année en Irlande, à tout juste 15 ans. Pile l’âge où les Irlandais bénéficient d’une « année de transition » afin de développer des compétences non académiques. Ce Francilien a ainsi joué dans une comédie musicale et a trouvé lui-même un stage en poussant la porte d’un magasin de sport. « Jamais en France j’aurais osé faire ça ! », s’étonne-t-il encore.

Apprendre l’autonomie

Ce séjour lui permet de parfaire son anglais, de mieux se connaître et d’apprendre l’autonomie, en gérant son argent et en effectuant le ménage dans la chambre mise à disposition par sa famille d’accueil. « Dans notre propre famille, ce départ nous fait tous beaucoup grandir. Il nous aide à comprendre et formuler plus profondément l’amour qu’on se porte mutuellement », assure Capucine.

En 2022, ce sont, comme Mattéo, 150 jeunes âgés de 14 à 18 ans qui, avec le Centre d’échanges internationaux, ont effectué un séjour de trois à douze mois à l’étranger. Cet organisme privé propose quatorze destinations, des pays anglophones au Japon, en passant par l’Espagne et la Norvège.

« Il est essentiel que le jeune soit moteur de ce projet », souligne Angelina Lecouturier, sa responsable des programmes scolaires. Un entretien permet de s’assurer que l’ado possède la maturité nécessaire ou est en mesure de l’acquérir. « S’il souffre d’anorexie ou de dépression, ce n’est pas à l’étranger qu’il résoudra ce problème. » Chaque année, quatre ou cinq dossiers sont ainsi refusés.

« Ce type de séjour n’est pas adapté pour des enfants qui présentent une angoisse de séparation », prolonge Agnès, psychiatre. Elle-même a effectué, à l’âge de dix ans, un long séjour en Irlande. Et les beaux souvenirs qu’elle en garde l’ont incitée à proposer à sa fille Adèle, aujourd’hui en CM2, à partir seule pour l’Espagne de mars à août, vacances comprises, par l’intermédiaire d’une association. De quoi, anticipe cette mère, « lui permettre de renforcer sa confiance en elle ».

Adèle, dix ans, six mois en Espagne sans ses parents

En attendant, Adèle se rend dans son école parisienne accompagnée de son correspondant, Nicolás. Tout comme elle ne parle pas encore espagnol, lui ne connaissait pas le français à son arrivée. « Il apprend à vitesse grand V, par immersion », s’enthousiasme Agnès.

Plusieurs organismes proposent de tels séjours. Avec des tarifs qui montent facilement à 8 000 ou 10 000 € par an. « Un investissement », fait valoir Angelina Lecouturier, convaincue qu’une expérience à l’étranger constitue « un plus sur Parcoursup ».

Il existe en tout cas une alternative bien moins coûteuse : Erasmus + offre y compris avant le bac des opportunités de mobilité, collective (avec la classe, notamment en primaire) ou individuelles (à partir du collège). Six cents collégiens et lycéens français sont ainsi partis seuls, en 2021, avec une bourse qui s’élevait souvent à un millier d’euros par mois. « Depuis septembre, cette mobilité est reconnue dans le parcours des élèves entrés en seconde. Dès l’an prochain, elle fera l’objet d’un rapport et d’un oral et comptera comme une option au bac », précise l’agence qui, à Bordeaux, gère ce dispositif européen.