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Décryptage

Lycées professionnels : les cinq grandes pistes d'une réforme réécrite

La ministre déléguée à l'Enseignement et à la Formation professionnels, Carole Grandjean, a présenté vendredi les pistes de refonte de la voie professionnelle. Le gouvernement recule sur sa mesure-phare, l'augmentation de la durée des stages. Tour d'horizon des propositions les plus marquantes.

La ministre déléguée, Carole Grandjean, a présenté vendredi le résultat des consultations sur le lycée professionnel (photo d'archives : en décembre à Toulouse).
La ministre déléguée, Carole Grandjean, a présenté vendredi le résultat des consultations sur le lycée professionnel (photo d'archives : en décembre à Toulouse). (FRED SCHEIBER/SIPA)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 27 janv. 2023 à 10:05Mis à jour le 29 janv. 2023 à 12:05

C'est une nouvelle étape dans la réforme de la voie professionnelle voulue par Emmanuel Macron. « Une des priorités de cette année », avait assuré le chef de l'Etat, début janvier. La ministre déléguée chargée de l'Enseignement et de la Formation professionnels, Carole Grandjean, a présenté vendredi le résultat des consultations lancées en octobre. Des concertations vont s'ouvrir en février avec les syndicats.

1 - La volte-face du gouvernement sur la durée des stages

L'augmentation de 50 % des temps de stage en entreprise, souhaitée par Emmanuel Macron, cristallisait les critiques depuis la présentation de la réforme. Carole Grandjean s'était engagée à la mettre en oeuvre dès septembre prochain . Mais elle a admis, vendredi, « une absence de consensus » pour augmenter ces stages sur les trois années du bac professionnel. Le gouvernement n'abandonne pas complètement l'idée, mais elle se ferait à l'issue du bac ou du CAP, et uniquement pour ceux qui s'engageraient dans une année supplémentaire. Une intersyndicale composée de la FSU, de la CGT, du Snalc, de SUD et de la CNT y voit le résultat de la mobilisation massive dans les lycées, mais continue de s'opposer à l'ensemble de la réforme.

Pour améliorer la qualité des stages, l'idée d'un label visant à identifier les entreprises les plus engagées dans la prise en charge des jeunes fait son chemin.

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2 - Allonger le cycle de formation après le bac ou le CAP

Parmi les propositions mises en avant par Carole Grandjean figure l'allongement du cycle de formation, de quelques mois voire d'une année supplémentaire, après le bac professionnel ou à l'issue du CAP. Soit pour permettre aux élèves qui n'ont pas obtenu leur diplôme de valider les blocs de compétence manquants. Soit pour accélérer l'insertion professionnelle, par une formation complémentaire d'initiative locale (FCIL) par exemple. Le gouvernement veut développer ces formations créées par les régions pour répondre aux besoins des entreprises.

Le risque serait celui d'une « concurrence » entre, d'un côté, ces FCIL et, de l'autre, les mentions complémentaires à bac+1, diplômes reconnus nationalement, pointait Pascal Vivier, secrétaire général du SNETAA-FO, à la veille de l'annonce. Le principal syndicat d'enseignants de lycée professionnel - qui n'a pas participé aux concertations - voit déjà cette mesure comme « une année de sas parking » pour des élèves qui n'auraient ni emploi ni offre sur Parcoursup .

Du côté des proviseurs, Olivier Beaufrère, secrétaire national du SNPDEN, s'interroge sur un allongement du cycle de formation d'un an qui mettrait « un coup d'arrêt au recrutement des BTS » et poserait des problèmes de places dans les établissements. Au sein de la même fédération syndicale, le SE-UNSA, qui avait réclamé l'allongement de ce cycle de formation, estime au contraire qu'il permettrait à certains lycéens de consolider les savoirs fondamentaux et à d'autres, de « parfaire leur formation professionnelle avant d'entrer dans le monde du travail ».

3 - Payer les stagiaires dès septembre

La gratification des stages, promise par Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle, devrait entrer en vigueur dès septembre. « Nous travaillons pour déployer la gratification des périodes de formation en milieu professionnel dès la rentrée 2023 », a annoncé Carole Grandjean.

Certains évoquent un montant de 200 euros par mois . Reste à en préciser les bénéficiaires - tous les lycéens professionnels ou une partie d'entre eux. Cette gratification, parfois appelée allocation d'études, ne serait pas versée par les entreprises, mais par les établissements scolaires - certains lycées redoutent d'avoir à assumer la gestion du dispositif.

Par ailleurs, des entreprises pourraient, à la rentrée prochaine, accueillir des classes entières de collégiens avec leurs enseignants durant une semaine. La demi-journée « Avenir » , expérimentée depuis septembre dernier, sera généralisée à la rentrée prochaine, avait annoncé le ministre de l'Education nationale, Pap Ndiaye, en marge du salon postbac de l'agence spécialisée AEF, début janvier. C'était un engagement de campagne d'Emmanuel Macron.

4 - Des options, comme pour le lycée général

Pour répondre aux critiques des syndicats qui redoutent « un formatage à l'emploi » et l'amoindrissement du contenu éducatif, une dizaine d'options pourraient être proposées aux lycéens - cinéma, sport, théâtre, musique ou encore philosophie. Elles existent déjà, sur certaines heures, en terminale. Elles seraient développées, pour rendre la voie professionnelle plus attractive. C'est « une piste intéressante qu'on va regarder, sous forme d'expérimentation », a annoncé Carole Grandjean.

« Nous donnerons plus de place au temps passé en entreprise sans rien renier des apprentissages fondamentaux », affirmait Emmanuel Macron début janvier. Dans un sondage récent fait par Viavoice pour le collectif « Une voie pour tous », 87 % des Français interrogés avaient souligné l'importance de l'enseignement théorique en lycée professionnel et des « savoirs fondamentaux », rappelle le porte-parole du collectif, Dylan Ayissi.

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5 - Des missions supplémentaires pour les enseignants

La réforme du lycée professionnel doit s'articuler avec les missions supplémentaires des enseignants, dans le cadre du « pacte » lié à la revalorisation des rémunérations .

Pour organiser cette « formation au service du parcours du jeune », la révision des obligations de service des enseignants pourrait être l'un des sujets de négociations avec les syndicats. Les professeurs de lycée professionnel devraient se voir proposer des « missions supplémentaires » portant sur les relations avec le secteur économique, l'animation d'un réseau d'anciens élèves dans les lycées ou encore l'organisation d'un pôle de stages.

Pour la rentrée 2023, des expérimentations sont prévues sur le décrochage, la poursuite d'études et de premières modifications sur la carte des formations pour qu'elle « suive les grands enjeux économiques et sociétaux », a indiqué Carole Grandjean. Sans préciser les modalités de reconversion des enseignants concernés par les filières qui fermeraient.

Quatre groupes de travail

Les concertations sur la réforme des lycées professionnels ont été réparties en quatre groupes de travail depuis octobre, pilotés par des recteurs.

Syndicats, représentants de parents d'élèves et du monde de l'entreprise et cadres de l'Education nationale devaient plancher sur la réduction du nombre de décrocheurs, la préparation à la poursuite d'études supérieures « requise par certains métiers », « l'amélioration significative du taux d'accès à l'emploi après l'obtention du diplôme », ou encore « les capacités d'initiative qui peuvent être données aux établissements sans compromettre le caractère national des diplômes », comme le rappelait Carole Grandjean, au début du mois, à l'Assemblée nationale.

Des décisions sont attendues en mars, après une réunion avec les proviseurs le 2 février, et une série de rencontres bilatérales avec les syndicats.

Marie-Christine Corbier

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