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« A l’université, on ne se sent pas toujours à sa place en tant que personne de couleur »

Contrairement au principe universaliste qu’il défend, l’enseignement supérieur est loin d’être épargné par les discriminations liées aux origines et manque de dispositifs pour les contrer.

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Publié le 27 janvier 2023 à 06h00, modifié le 27 janvier 2023 à 10h36

Temps de Lecture 5 min.

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Meriem Amara, 18 ans, ne compte plus le nombre de fois où on lui a dit qu’une « Arabe » à l’université était une erreur, qu’elle ne venait que pour la bourse, que ses parents « grattaient » l’Etat, et qu’elle prenait la place de quelqu’un d’autre. Certains profs la considèrent comme « exotique ». Parfois, lorsqu’elle se rend à des conférences à la Sorbonne, l’étudiante en géographie se fait tutoyer, « alors que le mec blanc qui passe derrière toi a droit à toutes les formules de politesse qui existent sur terre ».

Son camarade Wade Mulongo, 20 ans, lui aussi étudiant à la Sorbonne, constate : « Quand tu es noir et que tu t’exprimes mieux que d’autres personnes, tu passes pour le “Bounty” : noir à l’extérieur, blanc à l’intérieur. Un jour, j’ai pris la parole et c’est un camarade noir qui me dit “tu fais trop ton Philippe”. Ça m’a titillé, je l’ai calmé tout de suite. »

« Plus on avance sur l’échelle des diplômes (licence, master, doctorat), plus il est rare de trouver des étudiantes noires » – Fatimata Diallo, en master de géomorphologie

Yoan Victor, 19 ans, confirme. « En France, et surtout à l’université, on ne se sent pas toujours à sa place en tant que personne de couleur. » Las des remarques comme « tu n’avais qu’à rester étudier chez toi », « c’est bête de quitter la chaleur pour venir ici » ou bien « tu parles vachement bien français pour un Antillais », l’étudiant en géographie a fini par rentrer en Guyane pour intégrer une école de commerce.

Fatimata Diallo, quant à elle, a été ulcérée par un cours sur l’Afrique sahélienne où l’enseignant affirmait que « la colonisation, si elle a parfois été source de douleur, a apporté un vent de modernisation par sa mission civilisatrice ». D’après l’étudiante de 22 ans, « plus on avance sur l’échelle des diplômes (licence, master, doctorat), plus il est rare de trouver des étudiantes noires ». Elle était ainsi la seule femme noire dans son master de géomorphologie, qu’elle décrit comme « un véritable calvaire », où il fallait « constamment démontrer que les étudiants noirs sont aussi excellents, voire meilleurs que leurs camarades, contrairement aux stéréotypes véhiculés ».

« Forme de déni »

Ces témoignages sont tirés de l’essai Ouvrir la voix, de Candyce Bosson IV (Publishroom, 2021). Lorsqu’elle était inscrite en master à la Sorbonne, entre 2017 et 2019, la tutrice de méthodologie pour l’UFR de géographie a voulu comprendre « pourquoi il y a[vait] si peu d’étudiants noirs dans certains hauts lieux du savoir français ». Dans son mémoire, la jeune femme de 25 ans a donné la parole à une minorité étudiante « peu visible et peu entendue, qui cherche à gravir les échelons d’une société qui étouffe bien trop souvent sa voix ».

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