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Titwane

A la brigade criminelle de Versailles, des rendez-vous avec la mort

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Publié le 01 février 2023 à 18h00, modifié le 02 février 2023 à 01h13

Temps de Lecture 15 min.

Au début, il y a un visage, un regard encadré de mèches brunes, le sourire un peu fatigué, contrastant avec l’attitude bravache des mains posées sur les hanches. Anaïs a l’expression conquérante d’une postadolescente convaincue que tout va bientôt être possible, qu’à 18 ans elle quittera l’appartement où la photo est prise, devant des ustensiles et le chauffe-eau de la cuisine, la télévision allumée en toile de fond.

La scène d’après est à jamais figée dans la mémoire des personnes présentes ce jour de printemps 2021. Le corps presque nu d’Anaïs repose sur le brancard orange des pompiers. Des faux cils se décollent de ses paupières fermées. A ses oreilles brillent des diamants de verre et deux grosses perles blanches, des bijoux fantaisie. Autour du cou, son collier cache mal des traces rouges de strangulation. A la commissure des lèvres, une marque sanglante – l’impact d’un coup de poing – et des particules noires, signes d’une combustion.

Deux scènes et au milieu un abîme : un meurtre, un de ces chaos de violence que la brigade criminelle de la police judiciaire (PJ) de Versailles – la « Crim’ Versailles », comme l’appellent ses membres – tente d’absorber puis de transformer en vérité judiciaire. Derrière l’homicide, il y a bien sûr une victime, un ou plusieurs auteurs, un mystère, mais aussi un déchirement du tissu social et l’irruption de l’extraordinaire au cœur de la banalité. Pourtant, « le mal est décevant », prévient l’un des gradés. « Quand ils viennent à la Crim’, les policiers s’attendent à travailler sur des serial killers, de grandes figures ou des réseaux très organisés. En réalité, tout est souvent plus foireux. »

Un lundi d’avril 2022, nous voici dans les locaux du service. L’hôtel de police, situé dans un bâtiment classé qui accueillit autrefois les écuries de la comtesse du Barry, impressionne avec sa façade néoclassique et son côté suranné. Le contraste est saisissant avec le « bastion », le nouveau siège de la PJ parisienne, à une vingtaine de kilomètres de là, tout de verre et d’argent, en lisière du périphérique, près de la porte de Clichy. A Versailles, avec la perspective écrasante du château au bout de l’avenue, le poids de l’histoire se fait sentir. C’est ici qu’atterrissent les dossiers de meurtre les plus complexes des quatre départements de la grande couronne (Yvelines, Seine-et-Marne, Val-d’Oise, Essonne).

« Moi, je suis le chat noir »

Les fenêtres de la Crim’ donnent sur une cour pavée, au troisième étage. En dessous, l’antenne de l’office antistupéfiants et, au-dessus, la brigade de recherche et d’intervention (BRI) et ses drapeaux noirs à tête de tigre. Une hiérarchie dans les locaux comme dans les esprits : le meurtre est une matière plus grave que la drogue, mais moins prestigieuse que le grand banditisme et la gestion des prises d’otages, domaines réservés de la BRI.

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