Sucettes à la mozzarella. Cette saveur curieuse est celle du spectacle Balestra, mis en scène par Marie Molliens, pour la 34e promotion du Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne (CNAC). La production de fin d’études, toujours très attendue comme un baromètre de la création des arts de la piste et de la relève, a fait tanguer, jeudi 2 février, le public de l’espace chapiteau du parc de La Villette.
Depuis sa création en 1985, le CNAC propulse des artistes qui occupent le haut de l’affiche tels Johann Le Guillerm, Mathurin Bolze et Maroussia Diaz Verbèke, programmée jusqu’au samedi 18 février, au Monfort, à Paris. Une quinzaine de jeunes sortent chaque année de cette haute école après un cursus de trois ans, prolongé par quelques mois consacrés à la professionnalisation et la présentation d’une pièce conçue par un chorégraphe ou un metteur en scène repéré. Après Raphaëlle Boitel et Séverine Chavrier, c’est Marie Molliens, la patronne, fil-de-fériste et voltigeuse de la compagnie Rasposo, troupe de premier plan depuis la fin des années 1980, qui a été choisie par Peggy Donck, directrice du CNAC, pour embarquer la nouvelle génération sur les routes du travail.
Alors, sucré ou salé ? On commence par le bouquet de pierrots gourmands à collerette blanche offert sur une estrade. Ils sont quatorze à tirer la moue dans une ambiance nocturne et opaque. De l’eau chute des cintres dans des seaux éparpillés sur la scène tendue de filets, comme un piège. Ce cirque-là ne sourit pas, refuse le show « youp la boum », ne fait pas de la retape, ne joue pas les flonflons qui tournent rond. Il choisit le drame, le tremblement, les cris tonitruants, les sautes d’humeur, le rock qui crache. Sauf qu’à force de vouloir déborder et ruer dans les brancards du formatage, il en fait trop et laisse en plan le registre lunaire du noir et blanc.
Esprit de troupe
Et c’est là que la mozza en bouche un coin. Voilà qu’un acrobate extirpe d’un seau un petit bloc de fromage blanc, et puis un autre. Il jongle avec pour n’en faire qu’une bouchée ensuite. Une odeur de lait émane du plateau vite rincé. Vous en voulez encore ? Marabout et bout de ficelle, la chèvre apparaît en chair et en os et appelle fissa autour d’elle la ronde d’un rituel agricole nouveau genre. La suite file en zigzag.
Le titre du spectacle aurait dû nous alerter. « Balestra » est l’expression technique qui désigne, en escrime, « une figure d’attaque ayant pour objectif un changement de rythme chez l’adversaire ». Un besoin ressenti, indique Marie Molliens dans le dossier, par les étudiants. De fait, si la scène de sabres est trop vague et décorative, ça vire et volte sec sous le chapiteau, ça secoue en prenant des virages narratifs inopinés.
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