Hausse des créations d'entreprises en équipe et par les femmes

Les créations d'entreprises ont dépassé le million en 2022, pour la deuxième année consécutive selon l'Insee. Après les crises à répétition, sanitaire et géopolitique, « l'engouement ne faiblit pas », commente Laurence Tassone, responsable de l'observatoire de la création d'entreprise chez Bpifrance. « Nous nous demandons toutefois si nous ne sommes pas au bout de la résilience, car on constate généralement un décalage entre la conjoncture et ses effets négatifs sur la création d'entreprises. »

Pour l'instant, aucun signe de fléchissement. Au contraire, les niveaux de fin d'année sont les plus hauts jamais enregistrés avec plus de 90.000 entreprises créées chaque mois. Les effets du ralentissement économique et de l'inflation se feront-ils sentir en 2023 ? Les prochains mois seront déterminants.

Des projets plus ambitieux

Ce sont les sociétés (SAS, SARL, etc.) et non pas seulement les travailleurs indépendants qui tirent les statistiques. Bon an mal an, les sociétés représentent environ 30 % de l'ensemble des créations. L'an dernier, fait notable, elles ont progressé de 4,8 % devançant les microentrepreneurs qui progressent de 2,8 % tandis que les entreprises individuelles classiques reculent de 7,4 %.

En une décennie, le nombre de sociétés créées a presque doublé en France, passant de 163.400 en 2012 à 293.400 l'an dernier. Dans ce même laps de temps, la société par actions simplifiée ( SAS) a détrôné la SARL. Ce statut plus souple et qui permet au président de bénéficier d'un régime d'assimilé salarié, représente désormais les deux tiers des créations de sociétés.

La création en sociétés répond au développement de l'entrepreneuriat en équipe et du financement par ouverture du capital aux business angels et fonds d'investissement. « Les structures d'accompagnement favorisent ce modèle de croissance. Les exemples mis en avant sont ceux de la tech, ce qui suscite des projets plus complexes, plus ambitieux », analyse Jean-Marie Courrent, professeur en entrepreneuriat et directeur du Labex Entreprendre à Montpellier.

Des entrepreneurs plus vieux

Le bilan 2022 dessine des tendances sectorielles. « Les loisirs, le conseil aux entreprises, l'industrie connaissent des accélérations », souligne Laurence Tassone. Les créations dans les activités de loisirs, d'art et de spectacle et celles dans le conseil bondissent de près de 25 %. Celles dans l'industrie et l'artisanat progressent aussi de 18 %. A l'inverse, les créations dans le transport chutent de 34,5 %. La fenêtre d'opportunités ouverte par la crise sanitaire se referme.

Les radiations d'entreprises reflètent également ces soubresauts. On en comptait l'an dernier un peu moins de 350.000 selon le bilan annuel du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, en hausse de 11,6 %, dont la moitié environ concerne des fermetures volontaires. Cela confirme ce qui avait été observé dès 2021 : la hausse du nombre d'entrepreneurs qui cessent leur activité sans passer par une procédure judiciaire. Dans les transports, les radiations ont progressé de 33 % loin devant celles dans la santé, l'enseignement et les services qui ​augmentent de 17 %.

La baisse des créations dans les transports est quasiment du seul fait du recul des microentrepreneurs, souvent de jeunes entrepreneurs. La moyenne d'âge des créateurs dans les transports est de 31 ans. Conséquence : tous secteurs confondus, l'âge moyen des créateurs d'entreprise est en hausse, pour la première fois depuis plusieurs années. Il remonte au-dessus de 40 ans.

Des activités genrées

Une tendance qui ne se dément pas elle, c'est la progression du nombre de femmes dans l'entrepreneuriat. Elles sont désormais 43 % des microentrepreneurs et même 55 % des créateurs d'entreprise individuelle. « On atteint désormais la parité dans nos accélérateurs, confirme Marie Adeline-Peix, directrice exécutive de Bpifrance. Et dans les programmes d'accompagnement dans les quartiers, les femmes représentent 60 % des porteurs de projet. »

Mais il reste encore aux femmes à briser deux plafonds de verre : celui des secteurs d'activité et celui des sociétés. Le bilan annuel du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce enregistre également une progression des femmes parmi les dirigeants des sociétés créées l'an dernier. Mais on est encore loin de la parité à seulement 33,4 %. Et ce chiffre varie fortement selon les secteurs.

Dans la construction, les femmes représentent à peine 8,8 % des dirigeants, dans les transports tout juste 10,5 % et dans l'information et la communication un petit 17,5 %. En revanche, elles sont majoritaires à 53,9 % dans les services, et quasiment à parité avec 47,6 % dans la santé, l'action sociale et l'enseignement.