Le salon Art Capital se tient jusqu’au 19 février au Grand Palais éphémère, à Paris. Il regroupe environ deux mille artistes, selon Yvon Neuville, son président cette année. Il associe depuis 2006, à la demande du ministère de la culture de l’époque, le Salon des artistes français (créé en 1880), le Salon des indépendants (1884), le salon Comparaisons (1954) et le Salon du dessin et de la peinture à l’eau (1949 pour le dessin, la peinture à l’eau ayant été ajoutée en 1954). Quatre entités différentes par leur histoire, mais basées sur le même principe : ce sont des associations d’artistes qui organisent l’exposition annuelle de leurs membres et non, comme pour les foires, un regroupement de galeries montrant leurs poulains…
Or, avant son ouverture, Art Capital a sonné l’alarme et lancé une pétition : la subvention que lui versait le ministère de la culture (contacté, celui-ci n’a pas répondu à nos sollicitations), et qui permettait de payer la location du Grand Palais, a été drastiquement réduite : « De 300 000 euros, on est passé à 55 000 euros », dit Bruno Madelaine, président des Artistes français. Aux exposants de combler le déficit. Dans le cas de ceux du Salon des indépendants, « la cotisation est fixée à 100 euros pour adhérer à l’association, 145 euros s’ils veulent intégrer le comité, auxquels s’ajoute pour les exposants au Grand Palais [tous ne participent pas] un tarif qui va de 345 à 650 euros, selon la taille du tableau », précise Frédéric Julien, leur porte-parole.
Même si les tarifs peuvent varier d’un salon à l’autre parmi les quatre présents, multiplié par deux mille exposants, cela laisse grandement de quoi couvrir les frais. Mais la douleur est aussi symbolique : si la manifestation est toujours placée sous le patronage du président de la République, aucun ministre de la culture depuis Franck Riester (2018-2020) n’a cru bon d’en préfacer le catalogue. Signe, selon les exposants, d’un désintérêt pour leurs pratiques : « Le ministère promeut un art officiel, conceptuel, auquel nous n’adhérons pas, et il nous le fait payer », accuse Bruno Madelaine. Frédéric Julien tempère le propos et avance une autre explication : « Certains artistes clament haut et fort leur désintérêt, voire leur mépris des politiques. Je tente de recoller les morceaux, mais on ne leur envoyait même pas d’invitation officielle. Pas étonnant qu’ils ne nous aiment guère. »
« Appréciation cultivée »
Peut-être est-ce aussi un signe des temps. Au XIXe siècle, pour un artiste, le salon était un passage obligé, même quand il était par ailleurs représenté par une galerie. C’est ce que tente d’expliquer Renoir à son marchand Paul Durand-Ruel, en 1881 : « Il y a dans Paris à peine quinze amateurs capables d’aimer un peintre sans le salon. Il y en a quatre-vingt mille qui n’achèteront même pas un nez si un peintre n’est pas au salon. Voilà pourquoi j’envoie tous les ans deux portraits, si peu que ce soit. »
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