Saint-Denis : le lycée Paul-Éluard se mobilise pour Ouahiba, une élève «brillante» menacée d’expulsion

Ce vendredi, camarades, enseignants et parents ont réclamé la régularisation d’une élève de terminale soumise à une obligation de quitter le territoire. Elle se bat depuis avril 2021 pour obtenir un titre de séjour et ainsi poursuivre des études de médecine en France.

Saint-Denis, ce vendredi. Élèves, parents et enseignants du lycée Paul-Éluard se sont rassemblés pour soutenir Ouahiba M'Barki, une élève de terminale qui fait l'objet d'une procédure d'expulsion. LP/M.S.
Saint-Denis, ce vendredi. Élèves, parents et enseignants du lycée Paul-Éluard se sont rassemblés pour soutenir Ouahiba M'Barki, une élève de terminale qui fait l'objet d'une procédure d'expulsion. LP/M.S.

    « Des papiers pour Ouahiba », scandent les élèves du lycée Paul-Éluard devant la mairie de Saint-Denis ce vendredi après-midi. Ils sont venus soutenir leur camarade Ouahiba M’Barki, soumise à une obligation de quitter le territoire français (OQTF) depuis janvier 2022.

    Enseignants, parents d’élèves, élus et sympathisants de la cause du droit à l’éducation : outre des lycéens, plusieurs dizaines de personnes ont pris part à la mobilisation. « Nous voulons qu’elle puisse rester en France et sereinement », soutient Julie Morisset, enseignante de philosophie de cette élève de terminale. Elle décrit une jeune fille « brillante, avec d’excellents résultats scolaires et parfaitement intégrée ».

    « Je suis venue ici pour réaliser mon rêve »

    De nationalité marocaine, Ouahiba arrive en France en avril 2019 à l’âge de 16 ans, avec des membres de sa famille. Elle étudie d’abord dans un lycée du Val-d’Oise, puis au à Paul-Éluard à Saint-Denis. À sa majorité, en avril 2021, elle effectue une demande de titre de séjour. Requête rejetée. Elle fait alors l’objet d’une OQTF.

    Etant « célibataire et sans enfants », le préfet du Val-d’Oise considère qu’elle n’a pas d’attache familiale en France. Après un recours gracieux sans résultat, elle décide d’engager une procédure auprès du tribunal administratif de Cergy, qui confirme la décision du représentant de l’État en novembre dernier.

    Cette nouvelle a fait l’effet d’un coup de massue pour la jeune femme. « Je suis venue ici pour réaliser mon rêve, devenir chirurgienne, déclare Ouahiba. Je ne veux qu’étudier. »

    Saint-Denis, ce vendredi. Ouahiba M'Barki, élève de terminale, fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. LP/M.S.
    Saint-Denis, ce vendredi. Ouahiba M'Barki, élève de terminale, fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. LP/M.S.

    Alors qu’elle a fait appel de la décision du tribunal administratif de Cergy, elle envisage de déposer une nouvelle demande de titre de séjour, cette fois auprès de la préfecture de Seine-Saint-Denis. « Les procédures sont longues et anxiogènes, regrette Julie Morisset, par ailleurs membre du Réseau éducation sans frontières, une association qui aide notamment les élèves étrangers dans leurs démarches administratives. Dans ces conditions, on ne peut pas se concentrer pleinement sur ses études. »

    Un baptême républicain célébré à la mairie

    Cette situation est vécue comme une injustice par nombre d’élèves et personnels encadrants qui côtoient Ouahiba au quotidien depuis trois ans. « Aujourd’hui, nous nous mobilisons pour toucher un maximum de personnes pour faire entendre son histoire, pour Ouahiba et pour toutes les autres personnes dans la même situation », défend Annett, l’une de ses camarades de classe. Yanis, élu au conseil de la vie lycéenne, avoue son incompréhension : « Pendant la crise sanitaire, on a vu à quel point il manque de médecins en France. Ouahiba veut devenir chirurgienne et on lui refuse le droit de rester. »

    L’histoire de la lycéenne résonne particulièrement dans l’esprit de Mehdi, 22 ans. Surveillant au lycée Paul-Éluard et étudiant étranger à Paris 8, il a quitté l’Algérie en 2019 pour faire ses études à Paris : « Moi, j’ai eu la chance d’avoir un visa d’étude, mais je comprends ce qu’elle ressent. On est venus en France pour la même chose : avoir une vie meilleure, car on ne pouvait pas se projeter dans notre pays d’origine. Ce n’est pas une question de plaisir, mais de nécessité. »

    Après une marche allant du lycée à la mairie de Saint-Denis, les manifestants se sont rassemblés dans la salle des mariages afin de procéder à une cérémonie symbolique. Sous les applaudissements des personnes venues soutenir la jeune femme, Gwenaëlle Badufle, l’adjointe au maire chargée de l’éducation, a célébré un baptême républicain. La conseillère municipale Sofia Boutrih est devenue la marraine républicaine de Ouahiba.