Depuis quelques semaines, plusieurs quartiers de Paris vivent au rythme des rassemblements aux abords des établissements scolaires, des manifestations réunissant parents, enfants et enseignants, des réunions publiques, des pétitions, des occupations d’école. Les frontons de dizaines d’entre elles à travers la Ville s’ornent de banderoles portant toutes le même message : « Non aux fermetures de classes ».
La capitale se fait entendre au milieu d’une contestation qui s’organise dans toute la France contre ces fermetures, corollaire des suppressions de postes annoncées pour la rentrée 2023. Avec 155 postes retirés en primaire et 182 dans le secondaire, Paris est l’académie la plus touchée. Le rectorat a prévu la disparition de 162 classes en primaire (178 suppressions pour 16 ouvertures), soit 3 % du total. Une cinquantaine est aussi prévue en collège et une dizaine en lycée général. « C’est sans précédent, même pendant les années Sarkozy on n’en fermait pas autant d’un coup », souligne Audrey Bourlet de la Vallée, du SNUipp-FSU Paris.
Ce que l’association de parents d’élèves FCPE de Paris dénonce comme une « saignée » est le résultat, explique le rectorat, de la baisse démographique observée sur tout le territoire et particulièrement forte dans la capitale. En dix ans, Paris a perdu 27 500 élèves dans le premier degré, dont près de 14 000 entre 2019 et 2022. A la rentrée 2023, 3 100 élèves de moins sont attendus dans les écoles parisiennes. Le phénomène concerne aussi les collèges et les lycées, bien qu’il soit de moindre ampleur : environ 2 300 élèves de moins en septembre 2023 (– 2 %).
Territoires « surdotés »
Pour les enseignants, et surtout les parents qui se mobilisent en nombre – ils étaient encore plusieurs centaines devant le rectorat, le 14 février –, cette déprise ne peut servir d’argument que dans une « logique comptable », qu’ils rejettent. La contestation s’étend jusqu’aux élus, dont plusieurs ont exprimé leurs inquiétudes et leur désapprobation. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a écrit une lettre au ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, dans laquelle elle déplore un projet qu’elle n’estime « pas acceptable ».
La colère est d’autant plus forte qu’une soixantaine de fermetures concerne les établissements du Nord-Est parisien, dans les arrondissements les moins favorisés, dont 41 en éducation prioritaire. « Ces mesures conduiraient à dégrader le nombre d’élèves par classe dans les établissements où les publics sont les plus fragiles socialement et scolairement. Ce serait une régression majeure », dénonce Anne Hidalgo. Les chiffres ne sont pas encore stabilisés, mais de nombreux écoles et collèges touchés par des fermetures craignent que cela n’alourdisse les effectifs dans les classes restantes à la rentrée 2023, ne crée davantage de groupes multiniveaux et ne détériore les conditions d’enseignement.
Il vous reste 60.56% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.