A priori, le stockage de l’eau peut apparaître comme la réponse aux sécheresses. La capter dans la nature en hiver, lorsqu’elle se trouve « en excès » – comme disent les défenseurs de ce procédé –, pour l’utiliser en été apparaît en tout cas comme la principale solution envisagée par les autorités pour faire face au manque d’eau appelé à s’intensifier en été, et même dès le printemps. Cela semble si logique que de nombreux et très vastes lacs artificiels reposant sur des bâches en plastique sont en projet, en particulier dans le Sud-Ouest. Ils sont en général financés à 70 % sur des fonds publics par les agences de l’eau. La très controversée réserve de Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, par exemple, fait partie des plus imposantes : elle s’étend sur plus de 10 hectares. Entourée d’un mur de 8 mètres de haut, elle présente un volume global de 720 000 mètres cubes et peut contenir officiellement 628 000 mètres cubes.
Remplies par pompage
A la différence des retenues collinaires, les retenues de substitution ou mégabassines, selon leurs détracteurs, ne collectent pas le produit des précipitations, ni d’eau détournée d’une rivière. Elles sont remplies par pompage, au moyen d’un moteur, dans les nappes phréatiques pendant des semaines. Si elles sont autant prisées dans l’ancienne région Poitou-Charentes, c’est que celle-ci est plate et qu’elle manque d’eau après avoir asséché ses zones humides pour convertir ses prairies d’élevage en parcelles de maïs.
Cependant, sans pluie ni neige, les réserves des sous-sols ne peuvent pas se reconstituer. C’est pourquoi l’hiver 2022-2023, avec ses trente-deux jours consécutifs sans une goutte, montre bien les limites de cette approche. Cette année – et d’autres après –, il serait impossible de remplir les mégabassines que les représentants de l’agriculture conventionnelle, en particulier les irrigants, espèrent voir construire. Le préfet de la Vienne, où trente d’entre elles sont toujours officiellement prévues, l’a reconnu en janvier.
Soixante millions d’euros doivent être investis dans le programme de la Vienne, autant dans celui des Deux-Sèvres pour seize mégabassines. Les opposants s’interrogent : à quoi bon en construire autant dans ces conditions ? Par ailleurs, est-il bien raisonnable d’extraire la ressource hydrique du sous-sol pour l’exposer à la chaleur du soleil et donc à l’évaporation, aux cyanobactéries et aux contaminations diverses ? Ne faudrait-il pas plutôt investir dans une mue du modèle agricole vers des pratiques moins gourmandes en eau ?
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