Dans la petite salle vitrée située au cœur de la bibliothèque universitaire Jean-Dausset du campus de Bobigny (Sorbonne Paris-Nord), l’ambiance est studieuse, à peine émaillée, ici et là, de quelques rires discrets. Inès, Izza, Camélia et Selma, en première année de médecine, y révisent leur cours d’embryologie. Elles se sont rencontrées à la « BU » et y reviennent régulièrement pour s’entraider, se motiver. « A la maison, on a la flemme », résume Selma. « Ici, on travaille tous, tu sens que les gens autour de toi sont dans le même bateau », poursuit Camélia. Loin des allers-retours vers le frigo, de la dernière vidéo TikTok à regarder ou de la sieste inopinée, la BU est la garantie, pour les étudiants, d’un cadre favorable au travail. Qui a le mérite, pour ces filles qui n’habitent pas au même endroit, de constituer le meilleur des points de rencontre. Pour se fixer rendez-vous et avoir l’assurance de retrouver une compagne de labeur, elles ont même créé un groupe WhatsApp spécifique. Son nom : « Les stars de la BU ».
Pour Arnauld-Amaury Sillet, directeur du service commun de la documentation de Sorbonne Paris-Nord, le lieu permet effectivement de se forger un « collectif d’alliés ». Un constat à l’œuvre dans la salle voisine. Une dizaine d’étudiants de première année de médecine s’y retrouvent, sous la houlette de Sarah, qui explique à ses camarades les subtilités du cours de biophysique. L’émulation marche à plein. Manon constate que, quand la baisse de motivation la guette, « le fait de voir qu’à 18-19 heures, autour de toi, les autres continuent à travailler, cela redonne un coup de fouet ». Quant à Maëlo, s’il reconnaît s’asseoir souvent à côté de Charles « parce qu’il a plein de Stabilo », il note surtout que la BU lui permet de se concentrer davantage : chez lui, entre une sœur qui regarde la télé et une autre qui révise ses scènes de théâtre, l’ambiance n’est pas forcément monacale.
Réduire les inégalités
Si Maëlo a sa propre chambre, ce n’est pas le cas de tous les étudiants. La BU permet alors de se créer une bulle de concentration. Ou de rompre avec l’isolement de la chambre de cité U. De fait, « son rôle social est éminent » comme le souligne Marc Martinez, directeur de la bibliothèque de Sciences Po Paris et président de l’Association des directeurs et des personnels de direction des bibliothèques universitaires (ADBU). En effet, ce lieu offre un cadre fait de calme, de motivation mais aussi… de chauffage. Directeur de la bibliothèque universitaire de Paris-VIII, Christophe Pion se souvient d’une rupture dans les canalisations qui, un jour, a fait tomber la température de la BU à 13 °C. « Des élèves sont quand même venus parce qu’ils nous disaient qu’il faisait plus chaud que chez eux. » Et de rappeler que, dans son université, « la précarité est très importante. Deux tiers des étudiants déclarent avoir des problèmes de logement ».
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