Le ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, l’a plusieurs fois redit : les classes bilangues, sections internationales et autres classes à horaires aménagés sont un « levier » de mixité. En particulier dans les collèges, où une proportion toujours plus grande d’élèves favorisés est concentrée dans l’enseignement privé. Le raisonnement est simple : si « l’offre scolaire » publique est plus attractive que celle du privé, les familles seront moins tentées d’éviter le collège de secteur. L’argument du maintien de la mixité a été utilisé pour sauver les classes bilangues, remises en cause en 2015 par la réforme du collège. Ces classes, où les élèves étudient deux langues vivantes dès la 6e, avaient au moins le mérite de maintenir un peu de diversité dans des collèges de moins en moins mixtes, arguait-on.
En définitive, si 30 % des classes bilangues ont bien été supprimées à l’époque, un effort particulier a été réalisé pour en maintenir ou en ouvrir dans les collèges de l’éducation prioritaire (REP) : 65 % d’entre eux en proposaient en 2018, selon les derniers chiffres disponibles, ceux du rapport de la mission « territoires et réussite » (2019) codirigée par le professeur d’université Pierre Mathiot et l’inspectrice générale Ariane Azéma. Seuls 59 % des collèges hors REP offrent ce dispositif. En revanche, les sections internationales, réputées encore plus sélectives, sont encore peu nombreuses dans les REP, même si l’éducation nationale en a ouvert quarante-trois à la rentrée 2022 – et que le ministre en a promis seize de plus en 2023.
Quel est l’impact réel de ces dispositifs sur la mixité ? « C’est difficile à dire, indique Youssef Souidi, postdoctorant au CNRS, qui a consacré une thèse à ce sujet. Y compris parce que les bilangues font désormais partie du droit commun des collèges prioritaires, et qu’on a du mal à en faire un facteur différenciant. »
Le recrutement d’un collège étant fortement corrélé à son quartier d’implantation, l’efficacité du dispositif optionnel dépend en grande partie de la mixité préexistante dans le secteur. « Dans une grande métropole, où l’habitat est mixte, l’implantation d’une option attractive peut être efficace », détaille Youssef Souidi. A Paris, la cité scolaire Balzac (17e arrondissement), longtemps délaissée, a ainsi retrouvé ses lettres de noblesse en accueillant des sections internationales de la 6e à la terminale. « En revanche, poursuit le chercheur, un collège fortement ségrégué dans un quartier peu mixte aura beaucoup de mal à faire venir des élèves favorisés. »
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